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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 octobre.


Les regards aujourd’hui se portent de préférence du côté de l’Autriche-Hongrie et du côté de l’Espagne. C’est là que se passent, ou que se préparent et s’élaborent les événemens les plus graves, graves non seulement pour ces pays eux-mêmes, mais peut-être pour le reste du monde. Nous ne parlerons pas ici de l’Autriche, puisqu’un de nos collaborateurs a entamé dans une autre partie de la Revue une série d’études sur la situation où elle se trouve. Quant à l’Espagne, elle traverse la crise la plus redoutable qu’elle ait eue à subir depuis longtemps, et c’est avec une sympathie sincère que nous en suivons les phases diverses. Nous n’avons pas à prendre parti entre elle et les États-Unis. Nous sommes et nous désirons rester également en bons termes avec l’une et avec l’autre de ces deux puissances. Il nous est pourtant impossible d’oublier que l’Espagne est aussi rapprochée de nous que l’Amérique en est éloignée. Voilà de longues années que nous vivons avec elle dans les rapports du meilleur voisinage, au point qu’il nous devient difficile de comprendre ce qui a pu nous diviser dans le passé. Que ne nous a-t-il été donné d’avoir avec tous nos voisins une frontière naturelle aussi fortement déterminée et accentuée qu’avec l’Espagne ? Il nous est arrivé quelquefois de la dépasser, mais nous avons presque toujours eu tort de le faire, et cela n’a jamais été pour longtemps. Le mot de Louis XIV n’est pas vrai : il y a des Pyrénées, et elles nous aident à vivre amicalement avec l’Espagne. Il n’existe naturellement entre celle-ci et nous aucune opposition d’intérêts sur aucun point du monde, et si la conformité de ces intérêts n’est pas assez complète pour que nous unissions notre fortune à la sienne, nous nous réjouissons du moins de tout ce qui lui arrive d’heureux, comme nous nous affligeons de tout ce qui lui arrive de malheureux.

C’est dire que nous avons, depuis quelque temps, d’assez nombreuses raisons de nous affliger pour nos voisins. La double insurrec-