aux Européens de prendre à bail emphytéotique les terres incultes pour une durée de soixante-quinze ans au plus, et garantit aux indigènes le droit de propriété sur les terres qu’ils auront défrichées et cultivées. Une autre loi de la même époque stipulait que le gouvernement ne donnerait plus aucune extension à la culture du sucre, qui devait être définitivement abolie en 1890. À l’exception de la culture du café, cette loi balayait définitivement tout ce qui subsistait encore du fameux système de cultures forcées de Van den Bosch, dont la floraison et la chute divisent l’histoire coloniale de Java en deux périodes bien distinctes.
Ce qui caractérise surtout le nouvel état de choses consacré par la loi agraire, c’est que l’État n’exerce plus un monopole absolu ; le colon, le simple particulier, peut obtenir des terres pour la culture, en se conformant à certaines prescriptions : il peut conclure avec les indigènes des contrats, par lesquels ceux-ci consentent à cultiver sur leurs terres les produits destinés au marché européen et à les livrer contre paiement. Ces contrats furent souvent imposés aux habitans des villages par la contrainte des chefs indigènes, qui se laissaient corrompre par les Européens ; mais le gouvernement a fait disparaître cet abus en prohibant les contrats conclus avec des villages entiers par l’entremise des chefs : désormais les arrangemens doivent être pris individuellement avec les indigènes.
Une autre voie ouverte par la loi agraire aux entreprises privées, c’est la faculté de louera bail emphytéotique, pour un long terme, les terres en friche appartenant à l’État : la longue durée du bail permet à l’entrepreneur de récupérer les frais de défrichement, et lui confère un véritable droit réel, susceptible d’hypothèque et offrant des sûretés au bailleur de fonds. L’État trouve non seulement des avantages indirects dans ce système qui favorise le défrichement des terres incultes, qui tend à augmenter la production et le bien-être qui s’ensuit, mais encore des avantages directs, tels que les droits prélevés sur l’exportation des produits de la culture, les fermages et les impôts payés par l’emphythéote. On peut juger de l’importance de ce système d’exploitation par le fait qu’en 1892, le chiffre des terres concédées à bail emphytéotique s’élevait à 317 068 bouws[1], représentant une somme de fermages de 1 081 791 florins[2].