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LES MINES D’OR DE L’ALASKA
ET DE
LA COLOMBIE BRITANNIQUE


I

Le 30 mars 1867, le gouvernement russe cédait au gouvernement des États-Unis, moyennant une indemnité de 36 millions de francs, le territoire d’Alaska, ou l’Amérique Russe. Ce territoire mesurait 45 000 lieues carrées ; en fait, il n’avait d’autres limites au nord que celles que les neiges et le froid assignent à l’activité humaine. Peu d’années auparavant, en 1858, la Russie avait arraché à la Chine le cours inférieur du fleuve Amour et de ses affluens. Maîtresse de cette riche région, elle n’avait plus que faire de ses possessions américaines, dont M. Seward, secrétaire d’État de la grande république, négocia l’acquisition, soucieux avant tout d’opposer à cette extrémité nord-ouest du continent, une barrière à l’extension du Canada, et de ne laisser à l’Angleterre qu’une étroite façade sur le Pacifique.

Son idée était juste et l’affaire était bonne, mais on ne le comprit pas d’abord aux États-Unis. « Les négociations relatives à cette cession de territoire, a écrit M. Whymper, préoccupaient vivement l’opinion publique. Les Américains étaient peu favorables à cet agrandissement nouveau, et beaucoup n’en voyaient pas l’avantage. Aussi souleva-t-elle des critiques amères et une opposition acharnée. On accusa M. Seward d’entraîner le pays dans une désastreuse spéculation ; on désignait ironiquement du nom de Walrus-Seat, « plage des phoques », le territoire annexé. Chaque matin les journaux de New-York publiaient des annonces railleuses, offrant d’immenses avantages à ceux qui seraient tentés