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locales firent concourir 123 écoles. Une école du département de l’Orne et deux du Maine-et-Loire demandèrent à concourir avec les écoles bretonnes et furent admises. Les examens ont été faits dans 116 écoles ; 2 206 élèves y ont pris part ; 1 605 d’entre eux ont été diplômés. Deux écoles primaires officielles seulement ont concouru. On ne peut supposer que l’administration supérieure ait interdit à ses subordonnés de se mêler à une action si utile et d’un caractère si désintéressé. Il faut plutôt attribuer leur abstention à la surprise des premières heures, à l’hésitation qu’a pu leur causer un succès auquel l’enseignement officiel n’est pas accoutumé. Si le système adopté maintenant en Bretagne venait à se propager dans les autres contrées, il augmenterait certainement la popularité et l’efficacité de l’enseignement libre ; il y ajouterait une force qui mettrait en péril non pas l’enseignement officiel en lui-même, mais la manière dont il est aujourd’hui pratiqué par l’État, et les appréhensions qui en pourraient naître pousseraient sans doute le pouvoir à rendre à l’enseignement public un peu de cette éducation nécessaire dont il l’a privé.

On ne refusera pas à la Société des Agriculteurs de France la plus haute et la plus large compétence en matière d’agriculture : elle n’a guère de rivale en ce point, et la Société royale d’Angleterre, si elle est plus riche et plus libre, n’a point dans son sein de praticiens plus savans ni de savans plus familiers avec la pratique. Cette Société avait l’œil ouvert sur le développement que prenait l’enseignement agricole dans les écoles libres de Bretagne. Elle estima que l’épreuve était concluante et que l’état de cet enseignement, dans les écoles primaires de l’État réclamait une transformation complète. L’État avait beaucoup fait, mais il ne pouvait pas tout faire, et surtout il ne pouvait guère pousser plus loin l’enseignement pratique dans les écoles rurales : le budget de l’instruction publique tout entier n’y aurait pas suffi. Les communes elles-mêmes avaient tenté des efforts généreux, mais vains, en mettant à la disposition du maître d’école un jardin et parfois un champ d’expérience : le jardin sert à fournir de légumes le pot-au-feu de l’instituteur, le champ d’expérience lui apporte sa provision de pommes de terre.

Il s’est produit des efforts sérieux : des hommes intelligens et zélés ont mis leur orgueil au service de la plus noble des causes ; quelques-uns ont obtenu d’heureux résultats, dus à leur persévérance, à leur caractère bien plus qu’aux méthodes et aux programmes mis entre leurs mains. Malgré ces exceptions honorables, l’effet général est resté nul. On peut dire que l’enseignement de l’agriculture dans les écoles rurales n’existe pas en France. Pendant quinze ans nous avons été appelés à com-