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que le Souverain Pontife avait statué sans droit, il résolut de rajeunir et d’aggraver la Pragmatique sanction. Dans la Pragmatique, des évêques étaient intervenus, mais mêlés à des laïques et présidés par le roi : l’acte appartenait moins au pouvoir religieux qu’au pouvoir politique. Louis XIV voulut opposer au pape une croyance que l’Église de France elle-même et seule eût formulée : telle fut la nouveauté de la Déclaration de 1682. On vit alors une assemblée de trente-quatre évêques et de trente-quatre prêtres transformer en une doctrine religieuse la doctrine politique des libertés gallicanes. Cette doctrine fut résumée en quatre articles : déniant au pape tout pouvoir direct ou indirect sur les couronnes des princes, la Déclaration ne lui reconnaissait d’autorité que sur les choses purement religieuses ; elle enfermait l’autorité religieuse du pape dans les limites fixées par le concile de Bâle ; même contre le pouvoir ainsi diminué, elle se réservait un recours en tenant pour réformable toute décision du pontife tant que celle-ci n’aurait pas été consacrée par le consentement exprès de l’Église universelle ; enfin elle s’armait d’avance même contre l’Église universelle, en proclamant inébranlables les maximes et coutumes de l’Église gallicane. Trois de ces propositions tranchaient des problèmes que l’Église n’avait pas voulu résoudre dogmatiquement ; la dernière contredisait à la fois l’une des propositions précédentes et l’enseignement catholique, d’accord pour proclamer que l’union du pape et du concile possède la plénitude de la souveraineté religieuse. Abstraction faite de ses doctrines, et par cela seul qu’il prétendait fixer des doctrines, l’acte de 1682 méconnaissait l’essence même du catholicisme. Le catholicisme est en effet l’unité d’une foi qui assemble la diversité des races ; or, la Déclaration était la formule d’une foi particulière à une race. L’assemblée des évêques français n’avait compétence ni pour parler au nom de l’Église universelle, puisqu’elle n’était qu’une minorité dans l’Église ; ni pour parler au nom de l’Église gallicane, puisque dans le catholicisme aucun peuple n’a droit à une doctrine séparée.

La papauté n’eût pas cru à sa mission. si elle avait tenu ses droits pour légitimement bornés par de tels obstacles. Était-ce à la puissance chargée d’affaires temporelles et contingentes à paralyser par ses caprices l’autorité gardienne des principes permanens ; ou à l’autorité qui avait fixé les lois nécessaires des sociétés à assurer jusque dans la discipline des intérêts secon-