Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 142.djvu/662

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
656
REVUE DES DEUX MONDES.

offre à son hôte d’entrer s’asseoir… Très honoré !… Veut-il accepter de prendre quelque chose ?… Un verre de chartreuse ?

— Du tout, je prends… le train… Je n’ai que deux minutes, mais je tenais, avant de m’en aller, à vous faire mes complimens… cher confrère, du traitement si ingénieux… Saigner était une trouvaille ! Mais… qu’est-ce que vous avez, vous chancelez ?

— Rien, rien…

— Oui, ce que vous avez imaginé pour le docteur Palfrène est un coup de maître !…

— Je n’ai pu… faire autrement. Je… forcé par…

— Comment pas pu faire autrement. Mais si, vous pouviez au contraire employer le traitement banal, classique : alcool et réfrigérans combinés ; tandis que vous avez bien saisi la particularité du cas, un cas rare, des conditions à part. Vous lui avez sauvé la vie.

— Moi !… sauvé !… oh !

— Mais parfaitement !… Il va comme un charme… Plus de fièvre. Mes félicitations… Si vous venez à Paris, ne manquez pas de venir me voir.


« Drôle d’individu tout de même, fait le professeur en remontant en voiture. En voilà un qui ne paie pas de mine… Mais c’est à l’œuvre, dit le proverbe, qu’on connaît l’ouvrier, — donc celui-là doit être fort, — Eh bien, jamais je n’ai vu quelqu’un de si troublé par un compliment. Il bégayait… Qu’est-ce qu’il avait donc ?… Bah ! s’il n’y a plus d’originaux à Paris, il en reste encore au fond des campagnes, et je n’ai pas perdu mon voyage puisque j’ai découvert un médecin de talent,… qui est modeste ! »

Masson-Forestier.