consentement avant de régler le prix. La Prusse soupçonnait l’Autriche de faire secrètement son marché ; l’Autriche nourrissait le même soupçon à l’égard de la Prusse. Le temps se perdait en notes dilatoires. Les Français avaient, le 17 janvier, réclamé toute la rive gauche, et, le 20, demandé à la députation de délibérer immédiatement sur les moyens d’indemniser les États possessionnés sur cette rive. Le 27, la députation, soufflée par Metternich, répondit par un refus absolu : l’Empire n’avait pas été agresseur dans la guerre ; le démembrer était en ruiner la constitution. La députation réclama l’évacuation de la rive droite par les Français, la fin des contributions, réquisitions et confiscations sur la rive gauche, ajoutant que, d’ailleurs, la députation ne remettrait pas sur le tapis « les droits de l’Empire dans l’Alsace, la Lorraine, le cercle de Bourgogne qui, à la vérité, auraient dû être restitués en vertu du traité de Ryswick ». Les Français virent, en cette boutade tudesque, moins une impertinence qu’une invite à marchander ; et ils poussèrent leur pointe. Mais la députation les arrêta par une remarquable chicane sur les origines de la guerre, en 1792, et la fameuse déclaration que la France n’entreprendrait point de guerres dans le dessein de faire des conquêtes. Treilhard et Bonnier maintinrent que l’empereur avait été l’agresseur ; que, par suite, la déclaration ne signifiait plus rien ; que, dans aucun cas, elle n’excluait « les indemnités légitimes » ; qu’enfin la République, en réclamant le Rhin, ne le faisait point par le désir d’un agrandissement ; elle n’avait qu’un objet, aussi intéressant pour l’Empire que pour elle : « pourvoir, par des limites invariables, à leur tranquillité future. »
Las de piétiner ainsi sur place ; obligés, par leurs instructions, de laisser la Prusse et l’Autriche en suspens ; renonçant à obtenir le concours exclusif de l’une contre l’autre, et voyant que chacune des deux attendrait pour se prononcer de savoir ce qu’on donnerait à l’autre, afin d’en obtenir l’équivalent avec quelque superplus, Treilhard et Bonnier concentrèrent tous leurs efforts sur la députation. Ils déclarèrent formellement aux représentans des États possessionnés sur la rive gauche que la République ne céderait jamais ; que ces États avaient à choisir entre la confiscation pure et simple et l’expropriation avec indemnité, insinuant que, d’ailleurs, les princes allemands étaient les dupes de l’Autriche, cette cour ayant fait son lot, très vraisemblablement.