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Shargol je trouve le premier monastère bouddhique, perché dans les rochers sans autre accès qu’une échelle. A Moolbeck, un peu plus loin, autre monastère, un Gompa, comme on les appelle, juché sur un des rochers les plus pointus qui dominent le village et la vallée de Walkha. Blanc monastère couronné d’une bordure quadrillée rouge et blanc, maisons aux terrasses supérieures couvertes d’un toit et abritées du vent de deux côtés seulement. Ces hauts de maisons ouverts donnent un aspect particulier à tous ces villages.

Nouvelles mœurs qui commencent : à Karghil, dans le Baltistan, c’était la polygamie ; à Moolbeck, avec les Thibétains, — les Bhotis — c’est la polyandrie. Trois ou quatre frères ont la même femme, qui est encore libre de s’adjuger un ou deux époux de choix ayant les mêmes droits et les mêmes titres que les frères. La terre ne nourrit pas ses habitans ; on craint l’augmentation de la population ; la polyandrie n’est pas fertile, donc une économie. Beaucoup d’enfans se font lamas. La misère est grande au Ladak, dont le territoire s’étend généralement, au-dessus de l’altitude de la végétation, à la hauteur des neiges éternelles. Les nuages de la mousson des Indes s’évaporent au-dessus des incandescences rocheuses qui repoussent l’humidité. Les moindres morceaux de terre irrigables sont cultivés et forment des oasis. On produit de très belle orge et beaucoup d’abricots, comme au Baltistan, qui en expédie séchés par toute l’Asie. Ces petites taches de verdure surprennent dans cette nature de pierre. On voit dans la montagne les hommes marcher tout en filant, leur paquet de laine enroulé au bras et, à la main, une longue bobine qu’ils tournent et remplissent adroitement d’un fil de laine assez grossier.

Dès que l’on arrive dans le pays thibétain et bouddhique, on trouve partout auprès des villages, connue dans les lieux les plus déserts ou les plus périlleux, au sommet des cols par exemple, de petits monumens religieux de forme circulaire, évasée par le haut, placés sur un soubassement carré, et surmontés d’une aiguille annelée supportant un croissant très ouvert et une boule. On les appelle des Tchorten : ce sont des mausolées, soit privés, soit communs, dans lesquels on dépose, sous forme de pastilles, de petits cônes ou autres choses, à l’effigie de Bouddha, de minimes réductions des cendres de sa famille mêlées de terre. Quelques spécimens atteignent la grosseur d’une belle poire, dont un bout de bois en allumette représenterait la queue. Ces édicules anciens et modernes