d’action, aucune des questions posées ne resterait en suspens ; mais y a-t-il dans le concert européen un principe d’action, et n’est-il pas inventé plutôt pour empêcher des choses, très mauvaises sans doute, que pour en faire de bonnes, pour discuter plutôt que pour résoudre ?
L’Espagne vient de traverser une crise assez grave : elle en est sortie dans des conditions dont il est encore impossible de prévoir les conséquences. Un de nos collaborateurs, M. Charles Benoist, est allé récemment à Madrid et il en a rapporté, sur l’état des partis, et plus particulièrement sur cette question de Cuba qui leur cause à tous les mêmes anxiétés patriotiques, des renseignemens dont nos lecteurs ont pu apprécier tout l’intérêt. Il semblait résulter de cette enquête que la question cubaine imposait à tout le monde une trêve, unanimement acceptée, et que les conservateurs étant au pouvoir, les libéraux ne chercheraient pas à les y remplacer jusqu’à ce que la solution désirée par tous fût enfin obtenue. Cette conduite était prudente. Elle a été suivie pendant quelque temps avec une grande fidélité ; mais tout d’un coup, sans qu’il soit facile d’assigner à leur brusque rentrée en guerre des raisons bien plausibles, les libéraux ont recommencé la lutte. La situation à Cuba n’était pourtant encore ni assez améliorée pour que le moment fût venu de rompre la trêve, ni assez compromise pour qu’il fût légitime de la dénoncer comme une erreur ou une duperie. M. Sagasta s’est pourtant placé dans cette seconde hypothèse. Il a déclaré que tout allait mal à Cuba, que le général Weyler faisait aux insurgés une guerre de sauvage, que ces rigueurs excessives avaient enfiévré les esprits et les cœurs d’une colère grandissante au moment même où ils commençaient à se calmer, qu’elles avaient ruiné la plus grande partie de l’île, enfin qu’elles avaient surexcité les passions et les ambitions américaines, et que, les rapports avec les États-Unis devenant chaque jour plus difficiles, une rupture était presque inévitable. Que fallait-il pour conjurer ces mauvais présages ? Rappeler les libéraux au pouvoir. Alors tous les nuages, si épais naguère, se dissipaient comme par enchantement. On ne pouvait pas, sans doute, réparer eh quelques jours le mal matériel qui était fait, mais le mal moral disparaissait tout de suite. Le général Weyler était rappelé, les réformes étaient exécutées, tout rentrait dans l’ordre et dans la soumission, et les États-Unis, enchantés de ce changement inespéré, se montraient d’une humeur aussi conciliante qu’ils s’étaient montrés depuis quelque temps d’une humeur agressive et rébarbative. Malheureusement les libéraux étaient seuls à soutenir cette thèse, peut-être à y croire, et il faut avouer que, s’ils avaient dit vrai, ils n’auraient pas pu faire, bien qu’à leur insu, un