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Il faut en finir avec ces équivoques et ces bizarreries, et, adoptant une disposition analogue à celle de l’article 300 du Code de procédure pénale allemand, dire que « le président, sans entrer le moins du monde dans l’appréciation des preuves, indiquera aux jurés les points de droit à prendre en considération dans l’accomplissement de leur mission. »

Ainsi les jurés connaîtront enfin la loi pénale qu’ils doivent indirectement appliquer, et le président, qui est leur guide, ne feindra plus de voiler à leurs yeux ce qui est à l’audience l’objet des préoccupations de tous. Les jurés rentreront donc dans leur salle mieux éclairés sur leur tâche ; mais si, au cours du délibéré, des éclaircissemens sont encore nécessaires, nous demandons qu’il soit interdit au président des assises de pénétrer seul parmi eux.

Sans doute, nous souhaitons plus d’harmonie dans le concours des deux magistratures : mais, tant que l’idée de leur séparation sera maintenue, nous n’admettons de réunion du président et des jurés avant le verdict que si l’accusateur, la partie civile, l’accusé et son défenseur sont présens ; s’ils peuvent exercer au moment de cette consultation dernière (souvent décisive) le droit du contrôle mutuel qui n’est blessant pour personne, et qui est si nécessaire à l’œuvre de justice[1].

Le recrutement des deux magistratures et leurs rapports entre elles se trouvant ainsi modifiés, d’importantes réformes se produiront d’elles-mêmes à l’audience de demain. Nous en esquisserons bientôt le rapide tableau.


JEAN CRUPPI.

  1. L’Accusé devant la loi pénale de France, par Henry Marcy, p. 253 et suiv. La loi suisse et la loi allemande exigent, pour tout éclaircissement demandé au président des assises par le jury, le retour de celui-ci à l’audience même. — En Autriche, le président peut, à la demande des jurés, se rendre au milieu d’eux, avec le greffier, l’accusateur et l’accusé. — De même en Italie. En Espagne, toute demande d’explication entre les jurés et le président doit se faire par écrit et sans déplacement.