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magistrature. Cette question si délicate et si complexe fera l’objet d’un grand débat, le jour, prochain sans doute, où la France voudra posséder à l’égal de tant d’autres nations un Code d’organisation judiciaire. Peut-être nous permettra-t-on d’indiquer par avance que, dans un tel débat, les principes qui, selon nous, pourraient inspirer la réforme, se résument en cette brève formule : un petit nombre de magistrats, choisis avec un soin extrême, destinés de fort loin par leurs travaux et par leurs aptitudes à la mission spéciale qu’ils doivent accomplir, pourvus de traitemens larges, immuables sur leurs sièges, affranchis autant que possible des soucis dangereux de l’avancement… Mais ce problème ainsi posé dépasse le cadre de ces études. Contentons-nous ici, envisageant la magistrature telle qu’elle est, de rechercher les mesures propres à en extraire le meilleur président d’assises.

D’abord, pourquoi ce président est-il choisi parmi les conseillers ? Nous nous refuserons toujours à comprendre pourquoi à Paris, par exemple, la chambre des appels de police correctionnelle, et les chambres civiles où parviennent tant d’affaires minimes, sont présidées par des présidons de chambre, tandis que la cour criminelle, juridiction sans appel, est dirigée par un magistrat hiérarchiquement inférieur et investi pour quelques jours de si difficiles fonctions[1]. Notre désir serait de voir créer une fonction nouvelle pour le « président des assises », et de le voir placé sur un des plus hauts degrés de l’échelle judiciaire[2]. Si l’on ne veut point créer ce titre nouveau, on pourrait du moins choisir les présidens d’assises parmi les présidens de chambre de la Cour d’appel. Ces hauts magistrats seraient affectés d’une manière stable au service criminel, comme ils sont à l’heure actuelle affectés au service d’une chambre quelconque[3]. Cette solution, si naturelle, s’imposerait le jour où, supprimant un grand nombre de Cours d’assises inoccupées, on n’en aurait plus qu’une au siège de chaque Cour d’appel.

Mais trouve-t-on ces modifications trop difficiles et trop lointaines ?

Il en est une, urgente, et plus facile à réaliser.

  1. Voyez la Revue du 15 mars 1896, p. 421 et suiv.
  2. Ibid., p. 418.
  3. Ces mesures n’entraîneraient aucune augmentation du personnel judiciaire, car elles coïncideraient avec une réduction considérable du nombre des conseillers… Rappelons, en passant, que le nouveau président des assises siégerait sans assesseurs.