Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 141.djvu/910

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à Paris, sera plus difficile à constituer dans chaque arrondissement ? Cela est vraisemblable ; aussi pensons-nous qu’il y aurait avantage à réduire le nombre de ces commissions, à n’en avoir qu’une par Cour d’assises. Siégeant dans une ville assez importante, éloignée du canton, du clocher, des compromissions locales, composée de personnalités tout à fait indépendantes, cette commission remplirait sa tâche dans de meilleures conditions.

A Paris (et c’est Paris qui nous occupe particulièrement) la constitution de cette commission sera toujours aisée et brillante. Peut-être, grâce à elle, verrions-nous enfin une liste du jury digne de la grande cité. Esquissons en quelques traits la physionomie de cette liste souhaitée.

Le lecteur se souvient que, d’après nos recherches et les statistiques que nous avons établies, le jury de la Seine se compose actuellement surtout de petits négocians, détaillans, et d’un grand nombre de restaurateurs et débitans de boissons.

Si un juré est choisi dans ma rue, il y a bien des chances pour que le choix se porte sur le marchand de vins, dont l’établissement est un centre de conversations animées, et qui n’est point dépourvu d’influence politique ; sur ce marchand de vins, dont la funeste loi du 17 juillet 1880 a fait un tyran redoutable. Mais l’écrivain, le professeur au Collège de France, le propriétaire important, le patron de la grande usine et les meilleurs de ses ouvriers semblent tous dispensés, en droit ou bien en fait, de faire partie des trois mille. Or c’est à ces personnalités diverses que nous souhaitons voir confier le dépôt de la justice criminelle, et elles seront facilement désignées par notre commission de sélection réformée.


V

À ces jurés mieux choisis quel président donnerons-nous ?

Nous voudrions, on le sait, que le président des assises, siégeant sans assesseurs à côté du jury, eût de plus en plus à ses yeux la physionomie d’un guide sûr, d’expérience reconnue, d’évidente impartialité. Comment s’approcher, plus près encore que nous ne le sommes à l’heure actuelle, d’un tel idéal ?

Ici, on le sent bien, nous touchons à une question générale, encore ouverte dans ce pays : celle du recrutement de la