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d’exécuter ses projets. Tant qu’il vécut, elle se réunit tour à tour chez Conrart, chez Desmarets, chez Chapelain, chez Montmor, chez Gomberville, si bien que Pellisson, qui avait l’imagination fleurie, la comparait « à cette île de Délos des poètes, errante et flottante, jusqu’à la naissance de son Apollon. » Séguier la logea dans son hôtel ; mais c’était une hospitalité temporaire, qui ne pouvait durer que pendant la vie d’un homme. Louis XIV l’établit au Louvre, et elle y resta jusqu’en 1793.

Il lui accorda d’autres faveurs encore, qui lui étaient très précieuses ; par exemple celle de venir le haranguer, comme les cours souveraines, au retour de ses campagnes et dans les occasions solennelles[1]. C’était un grand honneur qu’on lui faisait et qui marquait d’une manière éclatante l’importance qu’elle avait prise parmi les grands corps de l’Etat. Tout se faisait pour elle comme pour les autres. Au jour fixé pour la réception, l’Académie se rendait à Versailles, avec le parlement, la chambre des comptes, la cour des aides. Elle se réunissait dans la salle des ambassadeurs, où le grand maître des cérémonies venait la chercher. Les académiciens s’avançaient deux à deux, le directeur et le chancelier à leur tête, puis les autres par ordre d’ancienneté. Ceux que leurs occupations retenaient à la cour, Bossuet, pendant qu’il faisait l’éducation du Dauphin, le marquis de Dangeau, Colbert lui-même avaient grand soin de se réunir à leurs confrères et prenaient place à leur rang. Les registres ne manquent pas de nous dire dans le plus grand détail comment les choses se passaient. « Le Roi était assis dans un fauteuil. Monseigneur le Dauphin, accompagné de M. le duc de Montausier, son gouverneur, MM. les princes de Conti, et M. le chancelier étaient proches de Sa Majesté, et toute la chambre était remplie d’un grand nombre de personnes de la cour et du conseil. Sitôt que le directeur a aperçu le Roi, il a fait une profonde révérence, puis une seconde en s’avançant, et une troisième en s’arrêtant. Sa Majesté a ôté son chapeau à chacune de ces révérences. Après que le directeur a eu parlé, le roi s’est levé et a dit qu’il confirmait avec plaisir à l’Académie française les assurances qu’il lui avait données de sa protection et a témoigné une satisfaction extraordinaire du

  1. Il faut lire dans les Mémoires de Perrault l’agréable récit qu’il fait de la façon dont s’y prit le président Rose pour obtenir cette faveur à l’Académie. Ce récit nous montre Louis XIV dans un de ses momens de laisser aller et de bonne humeur.