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évêques, car ils n’admettaient pas que les universités d’État pussent former des prêtres pleinement dévoués à l’esprit de l’orthodoxie. De son côté, le gouvernement royal éprouvait la plus vive répugnance à céder sur ce point. Peut-être était-il encouragé dans ses résistances par quelques ecclésiastiques dits d’Etat, (staatlich) qui étaient professeurs d’université ou voulaient le devenir. Les questions de personnes tenaient aussi une place capitale dans les négociations. Le Vatican était averti qu’aucun accord n’aurait chance d’aboutir aussi longtemps que le cardinal Ledochowski et Mgr Melchers seraient maintenus par le Pape à la tête des diocèses de Posen et de Cologne.

Le langage et l’altitude réservés de M. de Schlœzer n’indiquaient pas que les concessions auxquelles le Pape s’était décidé eussent satisfait entièrement le cabinet de Berlin. Ces concessions avaient été imposées au Saint-Père, d’après le ministre de Prusse, par la nécessité de ménager les sentimens des populations catholiques bien plus que par le désir de se rapprocher d’une façon sérieuse du gouvernement royal ; et on était encore bien loin de témoigner à la Prusse la confiance sympathique dont le Vatican donnait tous les jours tant de preuves à la Russie schismatique et à la France républicaine. Ces récriminations étaient sans aucun doute calculées en vue d’intimider la cour pontificale ; on entendait la contraindre non seulement à sacrifier à bref délai Mgr Melchers et le cardinal Ledochowski, mais encore à accepter comme archevêques de Cologne et de Posen des candidats agréables à la diplomatie prussienne.

Déjà on prononçait le nom du cardinal de Hohenlohe, évêque d’Albano : à diverses reprises, et bien avant de songer, comme l’avait fait le prince de Bismarck en 1872, à confier à ce prince de l’Église les fonctions d’ambassadeur du nouvel empire près le Saint-Siège, la cour de Prusse avait tenté d’utiliser la présence à Rome du frère de ce prince Clovis de Hohenlohe, qui a su conquérir une si grande place dans l’histoire de l’Allemagne contemporaine. En 1866, alors que le cardinal n’était encore que prélat, la diplomatie prussienne avait sollicité pour lui le siège de Cologne, devenu vacant par la mort du cardinal de Geissel. Pie IX avait refusé, alléguant l’insuffisance du candidat, mais lui avait conféré, quelques mois après, les honneurs de la pourpre, par déférence pour le roi Guillaume. En dernier lieu, après la mort en exil du prince-évêque de Breslau, M. de Schlœzer avait été,