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représentant de la Prusse au Vatican était à la fois profondément dévoué au prince de Bismarck, sous les ordres duquel il avait été placé quelques années auparavant à Saint-Pétersbourg, et assez dédaigneux des passions un peu sectaires dont s’étaient inspirés les meneurs du parti national-libéral, au début du Culturkampf. — On pouvait donc être assuré, à la chancellerie pontificale, de ne pas rencontrer chez ce négociateur les préjugés soi-disant historiques qu’avaient invoqués, d’ailleurs sans succès, les détracteurs du Pontificat romain pour détacher les catholiques allemands de l’obédience papale. De relations très sûres, aussi bienveillant qu’original, connaissant à fond l’Italie et les Italiens, M. de Schlœzer était étranger à ces passions qui ont dominé depuis vingt-cinq ans la politique du gouvernement du roi Humbert, et au nom desquelles les hommes d’Etat de la Consulta se sont constamment efforcés de faire de la Triple-Alliance une arme offensive contre la papauté autant que contre la France. — On pouvait être également sûr, à Berlin, qu’en dehors des difficultés inhérentes à l’état des choses, l’œuvre entreprise par le prince de Bismarck serait poursuivie au Vatican avec autant de persévérance que de sagacité et d’entrain. Dans des conjonctures aussi délicates le choix des hommes a une importance capitale : on le vit bien dès le début de la mission de M. de Schlœzer.

En ouvrant, au mois de novembre 1882, la session des Chambres prussiennes, l’empereur Guillaume s’était félicité du raffermissement des rapports amicaux avec le chef de l’Eglise catholique, grâce à la reprise des relations diplomatiques. Dans une lettre portant la date du 3 décembre, Léon XIII marquait sa reconnaissance pour ces déclarations si peu équivoques.


Que si les impérieux devoirs du ministère apostolique, plein de responsabilités devant Dieu et les hommes, Nous obligent, continuait le Saint-Père, à demander que la nouvelle législation ecclésiastique en Prusse, au moins dans les points essentiels à l’existence et à la vie de la religion catholique, devienne d’une manière définitive adoucie et corrigée, Votre Majesté, loin de l’attribuer au défaut de bonnes et conciliantes dispositions de notre part, voudra bien reconnaître que Nous le demandons dans l’intérêt même de la paix, qui ne pourrait être vraie et durable si elle n’était établie sur de solides fondemens. Cette pacification comblera un des plus ardens désirs de notre cœur et attachera avec des liens plus forts au trône de Votre Majesté l’âme de tous ses sujets catholiques ; elle fournira sans doute aussi la plus belle et la plus précieuse couronne de son long et glorieux règne…


La réponse impériale à cette lettre ne se fit pas attendre ; elle