qui s’attache à ces sortes de réunions, on ne saurait oublier que les incendiés du 4 mai ont succombé en accomplissant une œuvre de charité. La préoccupation dominante qui les avait conduits au bazar de la rue Jean-Goujon était celle des pauvres à secourir et à soulager. Il y a eu, à l’origine de ce désastre, une pensée de solidarité sociale. Et dans l’accomplissement même de la catastrophe, au milieu des flammes et de la fumée, dans l’ardeur impitoyable de la fournaise, le même sentiment a survécu et a produit des actes de dévouement qui honorent l’espèce humaine. Des domestiques, et en grand nombre, ont risqué leur vie pour sauver celle de leurs maîtres. Du dehors, de hardis sauveteurs n’ont pas hésité à se jeter dans le danger pour lui arracher des victimes. Lorsqu’on songe à l’instantanéité de l’événement, à la brièveté de sa durée, à l’horreur et à l’effroi qu’il devait inspirer, il faut bien croire qu’il a surtout mis en cause nos instincts les plus spontanés, et que tous ne sont pas égoïstes, ni mauvais. Il y a partout, mêlé à d’autres élémens de valeur moindre, un héroïsme latent que l’occasion fait éclore. Et c’est chose consolante, en notre tristesse, de penser que la menace d’un péril imminent, et le plus épouvantable de tous, a suscité d’autres sentimens que celui d’un sauve-qui-peut général. Beaucoup ont cherché avant tout à sauver les autres. Et nous ne connaissons que les survivans : qui sait, parmi les victimes désormais muettes, combien ont succombé pour n’avoir pas voulu se séparer d’une mère, d’une sœur, d’une personne aimée ?
Le souvenir de cette catastrophe pèsera longtemps sur Paris. Depuis les Adctimes princières dont la mort a mis en deuU des cours étrangères, jusqu’aux plus obscures sœurs de charité, toutes ont droit à la même sympathie. Le gouvernement a tenu à prendre sa part dans l’affliction générale. Il a décidé qu’un service funèbre serait célébré à Notre-Dame, et il y a assisté. M. le ministre de l’intérieur, qui a été son interprète, a fait entendre des paroles dignes de la circonstance. Rien de plus naturel, rien de plus convenable : le gouvernement manquerait à sa fonction la plus haute s’il ne s’associait pas par des démonstrations extérieures aux douleurs du pays, comme il le fait à ses joies ; et, malgré tout, on n’a pas encore trouvé mieux qu’une église pour servir de lieu à ces manifestations d’où la plainte humaine se dégage comme un sanglot et une prière. Mais ce qui nous a touchés encore davantage, parce qu’il y avait là quelque chose de moins obligatoire et de plus spontané, ce sont les marques de sympathie qui nous sont venues du dehors. En dépit des frontières qui nous séparent, des oppositions qui nous divisent, des souvenirs