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« tors de laurier ». Le tout est ajusté directement au mur, ou « embrevé » sur de légers montans de sapin, pour simuler des compartimens que la peinture aura charge de nuancer.

Les motifs saillans, les médaillons, les oves, les caissons s’il en existe, les angles de corniches et les dessus de porte sont en carton pâte ou en « staff » — mélange de plâtre, d’huile et de filasse — sortis des ateliers d’ornemanistes dont le stock s’alimente et s’enrichit, à grands frais, par des moulages empruntés aux monumens de toutes les époques. Ces sculptures factices, livrées encore humides et soutenues par une armature de métal que l’ouvrier fait disparaître au cours de la pose, durcissent en quelques semaines au point de devenir aussi résistantes que du bois.


III

Elles en ont la solidité, non l’aspect: c’est au peintre qu’incombe le soin de fondre sous son pinceau cet ensemble hétéroclite, de marier les surfaces de plâtre avec les saillies de bois et les attributs de carton. Il commence par recouvrir le tout d’une première couche d’huile dite d’« impression », puis d’un enduit au mastic de céruse qui sera, une fois sec, poncé et « égrené », avant de recevoir deux ou trois couches définitives. Le travail d’imitation de l’acajou ou du palissandre comporte des « polis » analogues à ceux des caisses de voiture ; le prix monte alors assez haut pour que l’on trouve avantage à remplacer la peinture par un placage, ou mieux un feuilletage, de ces bois eux-mêmes, réduits à l’épaisseur invraisemblable du papier à lettres. Minutieuse dans les pièces de réception, la préparation des murs ne consiste dans les corridors et les cuisines qu’en un « ratissage », léger passage à la céruse, suivi de l’application des couleurs qui bientôt sans doute ne se fera plus à la main.

Le pinceau traditionnel, à qui déjà sont substitués des procédés ultra-rapides, pour les balcons de fer, pour les persiennes que l’on immerge tout entières à plusieurs reprises dans des bains de peinture, serait à la veille d’être concurrencé par le travail à la trompette''. La machine ainsi nommée, qui barbouille en une minute deux à trois mètres de surface, se compose d’une pompe rotative aspirant le liquide tout préparé et le projetant en pluie fine. Un compresseur d’air multiplie la vitesse et la force de l’aspersion, faite par un orifice de 9 millimètres de diamètre