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façon de préparer la soie, un certain Plana, de Turin, remplissait des feuilles entières d’équations et de logarithmes, Bartolomeo Borghesi présentait aux lecteurs une « médaille inédite de la Gens Arria », et F. Re, — pour nous en tenir à ces quelques exemples, — rendait compte des « meilleures méthodes pour la culture des choux-fleurs. »


C’était, sans doute, ce genre d’articles que le baron Sardagna aurait voulu éviter. Il aurait préféré, à en juger par ses lettres, que la revue nouvelle fit une part plus large aux traductions, car il admirait fort les génies étrangers, et le romantisme naissant le ravissait d’enthousiasme. Mais sur ce point encore, ce fut Acerbi qui l’emporta sur lui. D’année en année, les littératures étrangères eurent moins de place dans la Biblioteca Italiana, et la littérature nationale y en eut davantage, jusqu’au jour où, par la plume d’Acerbi, la revue se déclara ouvertement hostile aux innovations romantiques.

Cela n’empêche pas, d’ailleurs, qu’Acerbi lui-même n’ait traversé, au début, une courte période de fièvre romantique. Il avait rencontré à Milan, durant l’hiver de 1815, Mme de Staël et A.-W. de Schlegel ; et à tous deux, naturellement, il s’était empressé de demander des articles. Schlegel avait promis un essai sur la Mythologie, et Mme de Staël avait donné, pour le premier numéro, une note qui devait servir de préface à une traduction en vers italiens de fragmens de Milton. L’essai sur la Mythologie passa inaperçu : ce n’était qu’un compte rendu assez banal d’un médiocre mémoire archéologique ; mais la note de Mme de Staël souleva une véritable tempête, et prêta lieu à une polémique des plus intéressantes.

Sous prétexte d’exposer les diverses méthodes de traduction et leurs avantages, l’illustre auteur de Corinne avait déploré, en termes très nets, l’état de profonde décadence où était tombée la littérature italienne. L’esprit italien, suivant elle, s’était appauvri à force de vouloir vivre de son propre fonds, et de se refuser à tout contact avec le génie des autres pays. Et le seul moyen de le ranimer était précisément d’ouvrir les portes toutes grandes aux influences étrangères.

À peine cette note avait-elle paru, qu’un journal, le Spettatore, la signala à l’indignation des patriotes italiens : et ce fut aussitôt, dans toute la presse, un débordement de protestations. La Biblioteca Italiana elle-même se vit contrainte à réparer, auprès de ses lecteurs, le mauvais effet de la note de Mme de Staël. Dans la seconde livraison, Gherardini fut chargé de prendre la défense de la littérature nationale. Tout en reconnaissant que « le Parnasse italien résonnait du