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catholiques, mais ne porteraient en principe aucune atteinte aux lois de Mai.

De son côté, en répondant à la seconde lettre du Pape à l’Empereur, en date du 20 avril, le Prince impérial investi de la régence se bornait à témoigner au Saint-Père son désir de mettre fin aux difficultés « que nous ont léguées nos devanciers et de ne pas envenimer une querelle qui remonte à plus de mille ans. » Ce nouveau document, où se trouvait ainsi rappelée en termes peu opportuns la querelle de l’empereur Henri IV avec Grégoire VII, ne contenait en réalité rien qui prouvât qu’on était disposé à Berlin à tenir compte de ce qu’à Rome on se croyait obligé de revendiquer pour l’Eglise comme des droits imprescriptibles. Dès lors, et malgré toutes les démonstrations sympathiques dont l’envoyé de Léon XIII était l’objet à la cour de Saxe, de la part non seulement du ministre de Prusse, mais encore de la part du grand-duc de Bade et de tous les hôtes du roi Albert, Mgr Aloysi devait considérer que le Vatican compromettrait la cause qu’il avait à défendre s’il consentait à prendre au sérieux de vagues avances dont on avait le droit de supposer que la pensée n’avait peut-être été suggérée au prince de Bismarck que pour exercer sur les catholiques, au moment des élections, une influence que le pape n’aurait pu favoriser sans mécontenter beaucoup les évêques victimes de leur fidélité au Saint-Siège.

Néanmoins plusieurs faits significatifs témoignaient qu’en Allemagne le désir d’un rapprochement avec Rome demeurait vif. Ainsi, ayant à pourvoir à l’évêché de Spire, le gouvernement bavarois y avait nommé le prédicateur de la cathédrale de Munich, l’abbé Ehrler, ce qui avait causé au centre bavarois une satisfaction sur laquelle il comptait si peu que le roi de Saxe crut devoir féliciter Mgr Aloysi de cette décision comme d’un succès inespéré. Mais la publication par le Staats-Anzeiger de Berlin des deux lettres adressées au Pape le 24 mars et le 10 juin par l’empereur Guillaume et par le Prince impérial vint provoquer des polémiques d’une portée assez grave.

Les journaux catholiques les plus modérés conclurent que, la lettre du Prince impérial ne laissant espérer du côté de Berlin aucune concession de principe, la nécessité s’imposait aux catholiques de se tenir sur leurs gardes et de continuer vis-à-vis de la majorité du Reichstag à défendre leurs intérêts avec une vigueur inébranlable. Au contraire, les organes officieux du