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principes exposés clairement par la plume de Raumer, interprète fidèle des conceptions politiques du chancelier.

La nouvelle représentation doit émaner du gouvernement seul, et doit être octroyée gracieusement d’en haut.

Le nombre des députés ne doit pas être trop grand ; il faut prendre avec prudence toutes les précautions nécessaires pour qu’il ne puisse s’organiser ni obstruction ni opposition contre les mesures prises par le gouvernement.

Et comme si ces principes politiques ne portaient pas assez clairement leur marque d’origine et n’indiquaient pas suffisamment l’influence des exemples napoléoniens, il ajoutait : « Le premier besoin de la nouvelle administration est un journal officiel calqué sur le modèle du Moniteur westphalien. »

On conçoit que l’Autriche[1] et la France, Metternich et Saint-Marsan, se montrassent pleinement rassurés sur les périls révolutionnaires que pouvait faire naître en Prusse une assemblée de notables constituée sur ces bases.

Huit fonctionnaires représentans de l’administration, dix-huit représentans de la noblesse, onze représentans des villes, huit paysans, tous désignés par l’administration, ne pouvaient faire courir grand danger à la monarchie prussienne. Encore, comme la noblesse protestait avec véhémence contre l’admission des paysans, qui avaient toujours été exclus des États provinciaux, le Gouvernement lui fit la concession d’accroître le nombre des députés de la noblesse. Le Brandebourg et la Poméranie ayant envoyé, sans autorisation, plus de représentans nobles qu’il ne leur en avait été attribué, on les admit sans difficulté[2].

L’idée de Hardenberg n’était point de prendre conseil auprès d’hommes autorisés à traduire fidèlement les vœux de la nation[3]. Les députés étaient, au contraire, dans son esprit, des intermédiaires qui devaient se pénétrer de la pensée du gouvernement, expliquer ses intentions, et calmer par là, s’il était possible, l’irritation que paraissaient soulever déjà ses premières mesures. Il ne les convoqua qu’après la promulgation des édits de finance, la partie la plus contestée de son œuvre ; et dès la première séance,

  1. De Bombelles à Metternich, 31 déc. 1810, A. Stern, op. cit., p. 169.
  2. Ranke, Denkwürdigkeiten des Staatskanzlers Fürsten von Hardenberq, IV, p. 246. — Treitschke, Deutsche Geschichte, I, p. 374, d’après le rapport officiel sur l’assemblée des États et députés du pays, conservé aux archives d’Etat à Berlin.
  3. Sack à Stein, 11 septembre 1810. (Stein’sches Archiv. Nassau.) A. Stern, op. cit., p. 168.