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savamment par les architectes, pour répondre à des exigences qui s’accroissent à mesure qu’elles se satisfont.

Encore le constructeur doit-il proportionner l’effort au résultat, le total du devis au revenu présumable : le capital engagé rapportera d’autant plus que l’édifice, debout, se louera mieux et aura coûté moins. Entre les mains des spécialistes, talonnés par ce double but à atteindre, l’immeuble parisien est devenu ce type que nous voyons, trop uniforme sans doute, comme doit être la solution d’un problème, mais d’une ingéniosité consommée depuis les fondations jusqu’à la couverture.

Dès le premier coup de pioche du creusement des caves, apparaît cette précision mathématique avec laquelle se poursuivra l’opération tout entière. Le gravatier, qui traite à forfait de l’enlèvement des déblais, est un puissant industriel, — le plus notable possède 700 chevaux et des charrettes à l’avenant, — dont les prétentions dépendent de la nature du sol, de sa conformation et du quartier où il est situé. Le terrassement comporte en effet trois phases distinctes : la fouille, la charge et le transport. Suivant que le fonds est plus ou moins compact la fouille sera plus ou moins longue : si, pour piocher un mètre cube de terre végétale, 50 minutes suffisent à un ouvrier actif, pour une terre crayeuse il ne lui faudra pas moins d’une heure 25 minutes, et il emploiera trois heures et demie à la même besogne dans un tuf très dur. Les estimations qui précèdent et celles qui vont suivre supposent un travail à la tâche ; elles servent de guide à l’entrepreneur pour le travail à la journée, où l’effort est naturellement moindre.

La qualité des terres fait varier aussi l’importance du volume à charger, à véhiculer, parce qu’il faut tenir compte du foisonnement et du poids relatif de chacune d’elles. Le mètre cube de terre de bruyère pèse 625 kilos seulement ; la même quantité de terre grasse mêlée de cailloux atteint 2 300 kilos ; la terre végétale ou l’argile, pesant de 1 300 à 1 700 kilos, tiennent le milieu entre ces deux extrêmes. Une terre remuée, et rendue susceptible d’être enlevée à la pelle, tient par cela seul plus de place ; c’est le foisonnement. Cette différence entre la capacité d’une excavation et le cube de remblai qui en sort, insignifiante pour les terres légères, énorme pour les sols rocheux, est en général d’un dixième. Mais les gravois et les terres rapportées, qui forment l’assiette de Paris, foisonnent davantage ; ils fournissent un