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nouvelle Via sacra par laquelle le pontife de l’univers se rendait à sa basilique d’évêque de Rome, Saint-Jean de Latran. Les révolutionnaires à la chemise rouge ne goûtaient pas cette poésie ; ils décrétèrent que le Forum serait éventré. Aussitôt de retour, Pie IX fit couvrir les fouilles commencées, reconstitua l’ancienne allée en la plantant d’acacias afin que l’ancien état fût plus vite rétabli.

Dans l’ordre spirituel Pie IX n’avait pas eu à réparer des dommages que la révolution n’avait pu accomplir : ce sont ses propres inclinations qu’il modifia. Ainsi, sans avoir jamais été l’ennemi des jésuites, ces grands serviteurs de l’Eglise et ces dévoués infatigables de la Papauté, il en avait parfois médit. Quand Prosper Faugère, l’érudit éditeur de Pascal, vint à Rome, Rossi le conduisit à l’audience du Saint-Père, et, dans la causerie, rappela l’édition des Pensées d’après les originaux. « Je le sais, dit Pie IX : Pascal, ajouta-t-il, a bien mérité de la religion ; son ouvrage réunit la splendeur et la solidité. » L’ambassadeur, craignant que le Pape oubliât les Provinciales, fit remarquer que Faugère ne s’était occupé que des Pensées. « Oh ! répondit vivement Pie IX, à la réserve peut-être de bien peu de choses, tout ce qu’a écrit Pascal est bon. « Puis il dit en italien : Anch’egli avea veduto che tutte le cose non erano genuine. — « Lui aussi avait vu que tout n’est pas parfait. » — En 1850, il prodigua les marques de confiance aux jésuites et les encouragemens à leur célèbre revue, la Civiltà Cattolica.

La propagation, la défense, l’exaltation de la foi le consolèrent de ses déceptions terrestres. Il rétablit la hiérarchie catholique en Angleterre et commença à s’occuper de la définition du dogme de l’Immaculée Conception. Aussi fut-il profondément affligé des innovations ecclésiastiques du Piémont. Quoi que pût tenter Victor-Emmanuel pour l’apaiser, il se montra intraitable. Aux lettres explicatives il répondit par des plaintes hautaines, il éconduisit les envoyés Sauli et Pinelli, approuva et loua Franzoni, et fulmina contre le Piémont dans une allocution consistoriale (1er novembre 1850).

Il est de style d’imputer au cardinal Antonelli cette attitude intransigeante. Livré à lui-même, Pie IX eût traité, dit-on, mais son abominable ministre l’en détourna par ses artifices. L’âme fière et forte d’Antonelli ne souffrit pas de cette calomnie plus que de toute autre ; il ne s’en est défendu plusieurs fois avec