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l’Angleterre, ses associées et non pas ses sujettes, les colonies autonomes, de l’acquiescement desquelles dépend la réalisation des projets de fédération. Elles sont réparties géographiquement en trois grands groupes : le Canada et Terre-Neuve, L’Australie et la Nouvelle-Zélande, l’Afrique méridionale.

C’est là que vit presque toute la population d’origine européenne de l’Empire britannique ; et non seulement elle y vit, mais elle y vit seule, dans les deux premiers groupes, du moins, où les blancs n’ont en face d’eux que quelques tribus sauvages, vingt fois moins nombreuses que les immigrés et qui auront disparu dans peu de dizaines d’années. En Afrique, les noirs sont trois ou quatre fois plus nombreux que les Européens, mais ceux-ci n’en forment pas moins un groupe important qui s’est montré depuis plus de vingt ans parfaitement capable de se gouverner lui-même ; le pays est paisible, les indigènes soumis et tranquilles, les représentans du Cap et de Natal seraient dignes, à tous égards, de siéger à côté de ceux de l’Australie et du Canada. Voilà donc des colonies où l’élément blanc possède soit une énorme majorité numérique, soit le monopole de l’énergie et de l’activité, où il est, en un mot, l’élément essentiel du pays. Peut-on, cette fois, dire d’elles à juste titre, comme M. Chamberlain, qu’elles ont avec la mère patrie « une origine, une langue, une littérature commune… des principes communs à affirmer, des intérêts communs à préserver » ? Il faut, ici encore, faire une restriction : les Anglais n’ont été les premiers à coloniser ni leurs possessions actuelles de l’Amérique du Nord ni celles de l’Afrique du Sud : ils avaient été précédés dans les premières par les Français, dont les descendans forment aujourd’hui un tiers de la population totale du Canada et ont conservé intactes leur religion, leur langue et leurs lois ; dans les secondes les Hollandais étaient venus avant eux, et les fils des premiers colons, les Boers, non contens d’être aussi nombreux que les Anglo-Saxons dans les colonies britanniques ont fondé à côté d’elles des États dont ils ont maintes fois montré qu’ils savaient défendre l’indépendance. Dans notre siècle, toutefois, l’immigration qui s’est dirigée vers les possessions anglaises est venue presque entièrement des îles Britanniques ; on n’y voit rien de semblable à l’extraordinaire mélange de gens accourus de tous les coins de l’Europe que l’on peut contempler aux États-Unis, et l’Australie qui, elle, ne date que d’un siècle, qui n’a pas connu d’autres maîtres que les Anglais, est habitée