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l’illustration qui se complètent l’un l’autre et qui en apprennent plus qu’un gros traité sur ces vieilles civilisations d’Orient.

La Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, — dont la librairie Mame vient de faire paraître le premier volume, d’une exécution irréprochable et qui répond si bien à tout ce que l’on pouvait attendre de l’habileté, du goût, on peut ajouter, de la munificence des éditeurs, — occupera, elle aussi, une place distinguée à côté des chefs-d’œuvre de l’iconographie chrétienne, sans cependant ressembler à aucun, ni pouvoir leur être assimilée. Aussi bien ce n’est pas en quelques lignes qu’on a la prétention de juger ce magnifique ouvrage qui sera ici même l’objet d’une plus importante étude. Ces reproductions des principaux événemens de la vie de Jésus, dont M. James Tissot a si bien saisi et rendu les côtés idylliques et dramatiques, n’ont certes pas toute la vigueur de coloris des originaux, mais elles n’ont rien perdu de leur charme mystérieux.

Et puisque nous parlons de choses saintes, il est plus d’une scène qui rappelle la Bible dans l’édifiant tableau que M. Boyer d’Agen nous donne la famille et la jeunesse de Léon XIII[1], plus d’un trait qui pourrait être emprunté aux Évangiles dans ce milieu patriarcal où naquit Joachim Pecci, le plus illustre descendant d’une noble famille originaire de Sienne et, depuis plus de trois siècles, fixée à Carpineto, petite ville de la campagne romaine, perchée sur le sommet d’une verte colline, avec le décor enchanteur de la Semprevisa et du Monte-Capreo. C’est là que celui qui devait être le futur pape grandit, et passa toute son enfance et sa jeunesse en compagnie de ce simple peuple de pâtres. Une chanson y suffit au chevrier qui pousse en avant son troupeau, comme la lecture de l’Évangile au bon seigneur de la contrée, que sa famille entoure et écoute avec dévotion, assise à l’ombre des chênes paternels. C’est à la source des plus chers souvenirs de la famille Pecci, dans les archives conservées dans la bibliothèque du casino ou château du comte Pecci, qui lui fut ouverte sur l’ordre du saint-père, que M. Boyer d’Agen a puisé ses informations, s’aidant de toute la correspondance inédite du colonel Pecci, de ses ancêtres et de ses fils, pour retracer leurs origines, écrire ce livre tout plein d’enseignemens, — car on peut compter parmi les plus admirables la lettre de la comtesse Anne mourante à son fils, ses instructions qui rappellent sainte Monique ; et la correspondance de Joachim, l’intrépide chasseur d’autrefois devenu pasteur de peuples, — et qui contient pour les petits de ce monde un encouragement, pour les puissans un exemple donné par le plus grand des fils de la chrétienté.

Assurément on ne saurait comparer l’œuvre originale que Jehan Foucquet mit plusieurs années à dessiner et à peindre, à des copies rapidement tirées par le procédé industriel de l’héliogravure de

  1. La Jeunesse de Léon XIII. — De Carpineto à Bénévent, 1 vol. in-8o illustré ; Mame.