support, lorsque les matières ajoutées forment 400 pour 100 de son poids, comme il est d’usage pour la passementerie, notamment pour les franges. Les tissus d’un prix moyen sont chargés simplement au double ; le teinturier reçoit du fabricant 100 kilos de soie grège et lui rend 200 kilos de soie prête à être tissée. A mesure que le prix de l’étoffe augmente, les corps étrangers y tiennent moins de place ; ils disparaissent totalement aux environs de 20 francs le mètre.
Ces alliages d’ailleurs n’ont pas indistinctement les effets désastreux que l’on serait porté à se figurer ; les soies noires ou sombres, que l’on épaissit avec des produits végétaux, — cachou, noix de galle, extrait de châtaignier — gagnent à la fois en qualité et en quantité, parce que ces tannins protègent le fil. Au contraire les étoffes claires que, faute d’un meilleur procédé connu, on doit charger métalliquement, risquent de tomber en poussière au bout d’une dizaine d’années, parce que l’élément chimique attaque et ronge le fil auquel il est incorporé.
La soie teinte et chargée est jetée tout humide dans une « essoreuse », tournant avec une rapidité vertigineuse, qui la dessèche en quelques minutes. Elle sort de cette turbine, dure comme un morceau de bois, pour se rendre à la « chevilleuse », dont la torsion énergique lui rend sa souplesse ; et, comme elle demeure néanmoins crépeuse et froissée, un dernier mécanisme, l’ « étireuse », a pour mission de la lisser et de l’allonger.
Bien que ces divers engins aient leur importance, la teinture n’en reste pas moins, au point de vue des moteurs, fort en retard. Sa main-d’œuvre ne diffère pas à Lyon, pour colorer les premières étoffes du monde, de ce qu’elle est en Turquie pour les bordures de burnous des Arabes du désert. Il existe cependant en Amérique, en Allemagne et en Suisse, des machines à vapeur et à bras qui économisent les trois quarts du prix de façon. Ces appareils imitent automatiquement les mouvemens usités en teinturerie et les exécutent avec une rapidité très supérieure à celle d’ouvriers manœuvrant philosophiquement des kyrielles de bâtonnets. Le plus curieux est que l’inventeur n’est autre qu’un Français, un Lyonnais de vieille souche, M. César Corron, à qui sa ville natale est déjà redevable de plusieurs perfectionnemens. Ainsi que beaucoup de ses devanciers, celui-ci voit les usines étrangères profiter avant les nôtres de sa découverte.