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deux dernières années, mais les variations sont peu sensibles. Cette industrie est très localisée ; sur les 744 000 hectolitres produits en 1895, le Nord à lui seul en a fourni 264 000, Seine-et-Marne 74 000, Seine-et-Oise 86 000 et les Deux-Sèvres 35 000 ; ces quatre départemens ont donc produit 460 000 hectolitres, ne laissant pour tout le reste du territoire que 284 000 hectolitres.

Peut-on espérer que la distillation de la betterave se répandra, et qu’un plus grand nombre de nos départemens participeront aux avantages que procure la transformation du sucre en alcool ? Cette extension ne peut avoir lieu qu’avec l’ouverture de nouveaux débouchés, car les prix actuels montrent que la consommation absorbe à peine les quantités produites, et tout d’abord on ne peut songer qu’à augmenter la production de l’alcool destiné aux usages industriels ; celle de l’alcool comestible n’est que trop considérable et les progrès de l’alcoolisme sont trop rapides pour qu’on ne cherche pas à les enrayer par tous les moyens possibles.

L’alcool, en effet, n’est pas seulement consommé en nature, ou employé à la préparation de boissons variées ; il sert encore à nombre de préparations industrielles et aussi comme combustible.

Si l’alcool destiné à ces usages devait supporter la totalité des droits énormes établis sur l’alcool de consommation, ses applications seraient très restreintes ; aussi a-t-on dégrevé partiellement l’alcool dit dénaturé, c’est-à-dire mélangé à des substances qui le rendent imbuvable et dont il ne peut être séparé économiquement. Or il n’est pas impossible que les pouvoirs publics consentent à diminuer les droits qui pèsent encore sur l’alcool dénaturé, ou qu’on arrive même à les supprimer complètement comme on l’a fait en Allemagne. L’alcool dénaturé est un combustible très commode, et qui se répandrait rapidement dans toutes les petites localités où la fabrication du gaz n’est pas établie, si on pouvait se le procurer à 0 fr. 40 ou 0 fr. 50 le litre ; c’est seulement sous l’influence d’une consommation plus active qu’il y a chance de voir s’établir de nouvelles distilleries agricoles.

Il n’est même pas certain qu’une augmentation de consommation de l’alcool dénaturé tournât au profit de la culture de la betterave ; peut-être que les nouveaux établissemens se monteraient pour distiller les pommes de terre et les grains comme on le fait en Allemagne ; on y est bien convaincu que l’alcool n’est qu’un produit secondaire, et que c’est avant tout vers l’alimentation économique des animaux qu’il faut tendre ; or, quand on produit un hectolitre d’alcool avec des betteraves, les pulpes