Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 138.djvu/653

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui assainissent les pièces de betteraves ne coulent que tardivement pendant l’hiver, tandis que ceux qui reçoivent les eaux des terres qui ont porté du blé débitent, pendant les années humides, de grandes quantités de liquide. De mars 1893 à mars 1894, les eaux de drainage écoulées des cases de végétation du champ d’expériences de Grignon ont entraîné trois fois plus de nitrates quand elles provenaient des chaumes de blé que lorsqu’elles coulaient au-dessous des cultures de betteraves.

Les terres préparées pour les betteraves reçoivent donc de copieuses fumures, d’abondans résidus provenant des plantes elles-mêmes ; elles s’enrichissent, et les départemens qui cultivent la betterave sont aussi ceux qui obtiennent les plus belles récoltes de blé.

Les denrées agricoles sont tombées aujourd’hui à des prix tellement bas, que la production n’amène de bénéfice qu’autant qu’elle est conduite avec la plus stricte économie ; à ce titre encore la betterave est précieuse, car elle permet de substituer aux chevaux, pour tous les travaux de la ferme, les bœufs, grands consommateurs de betteraves, dont la vente, après quelques années de service, compense le prix d’achat.

C’est enfin de la betterave qu’on extrait le sucre, et après fermentation l’alcool ; or dans toute l’Europe ces deux produits, largement imposés, fournissent à tous les États de gros revenus ; aussi la culture de la betterave est-elle partout soutenue, encouragée par les pouvoirs publics. Ces encouragemens sont-ils toujours sagement distribués ? la culture elle-même est-elle partout conduite de façon qu’on en tire le maximum de profit ? Ce sont là des questions importantes auxquelles je vais essayer de répondre.


I. — EXIGENCES DE LA BETTERAVE. — ENGRAIS EMPLOYÉS

La betterave est une plante exigeante qui ne réussit que sur les terres fertiles, enrichies par de fortes fumures. J’ai pu montrer cette année même aux visiteurs du champ d’expériences de Grignon combien (die est plus sensible à la richesse du sol que les autres plantes de grande culture.

Depuis la création du champ d’expériences en 1875, quelques parcelles ont été ensemencées tous les ans, mais n’ont reçu aucun engrais ; elles sont placées à côté les unes des autres, perpendiculairement à la direction des sentiers qui séparent les diverses cultures. Dans chacune des longues rangées portant la même