faut en finir, et que s’il est réélu cette année, il se considérera désormais comme inamovible ; quelle que fût l’illustration et la bonne renommée du signataire, s’il n’était pas immédiatement révoqué par le ministre de la guerre, on ne manquerait pas, faisant droit à sa demande, d’examiner ses titres scientifiques, ses droits acquis et son état mental. Telle était la situation provoquée et voulue par Comte au début de la crise. Personne ne songeait à discuter sa position, on tolérait ses imperfections, et l’on fermait les yeux sur les griefs, comme on avait si longtemps souffert les torts autrement graves et l’incapacité notoire de Reynaud.
On pourrait voir, dans cette manière de poser la question, la confirmation de l’accusation que je n’accepte pas.
Si Comte n’avait pas publié la préface du sixième volume de son Cours de philosophie positive dans laquelle il insulte le conseil d’instruction, sa situation n’aurait pas été menacée.
On peut donc dire qu’à cause de cette attaque il a été destitué. Sa destitution est donc une vengeance ! Ce serait très mal raisonner. Le conseil devant lequel il a succombé était composé d’une vingtaine de membres. Quatre ou cinq, tout au plus, sans avouer un désir de vengeance, alléguaient l’inconvenance des attaques et l’impossibilité de les tolérer. « Il nous brave et nous jette le gant, s’écriait le professeur de littérature qu’il avait appelé maître de français, nous devons le relever ! » Je ne saurais, à cinquante ans de distance, dire quels étaient les autres ; le plus ardent était Liouville. La majorité du conseil adressait d’autres objections. Le général commandant l’école reprochait à Comte de commettre dans le classement des candidats de flagrantes et scandaleuses erreurs. Des plaintes lui étaient adressées de toutes les parties de la France.
Un tel reproche, après les succès unanimes de 1837, doit sembler étrange. Comte avait donc changé sa manière d’examiner ? Tout au contraire. On lui reprochait de reproduire les questions ingénieuses, qui, imprévues naguère, s’adressaient aujourd’hui à des élèves exercés à jouer à leur occasion une comédie dont il était dupe. Dans les écoles préparatoires et dans les lycées, on enseignait non seulement les colles de Comte, mais la manière d’y répondre. Il n’était pas rare d’entendre dire à un maître : « Cet élève n’est pas fort, mais il sait très bien ses colles de Comte, son succès ne m’étonnerait pas. » Ces propos le faisaient sourire. Croyait-on que, dans une lutte de finesse, il pût avoir le dessous ? On s’en disait certain. On citait les élèves intelligens et spirituels, mais peu instruits, qui, connaissant bien les pièges tendus sur leur route, feignaient d’y tomber, pour se relever avec grâce