Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 138.djvu/547

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de leurs satellites forme assurément un système, dont les diverses parties ont des mouvemens altérés par leurs actions réciproques et uniquement par elles. Personne n’ignore que la somme des forces vives ne reste pas constante, même dans un temps donné.

Dans un système quelconque, la force vive est un des deux termes de la somme qui reste constante. Ni dans le passage cité, ni dans aucun autre, Comte ne fait mention du second terme, que nous nommons aujourd’hui énergie potentielle, mais qui, sous un autre nom, était parfaitement connu, et depuis longtemps, quand il a écrit son livre.

Il ne faut pas s’étonner si d’un principe faux on déduit des applications erronées. On lit à la page 722 : « Ce théorème présente directement la considération dynamique d’une machine quelconque, sous son véritable aspect, en montrant que, dans toute transmission et modification de mouvement effectuée par une machine, il y a simplement échange de force vive entre la masse du moteur et celle du corps à mouvoir. »

Quelque complaisance qu’on veuille y mettre, il semble impossible de nier que l’auteur des lignes précédentes ignore la théorie des machines.

Si, pour le justifier, on veut admettre qu’en parlant d’une machine quelconque il exclut, sans le dire, les machines mues par une chute d’eau, la transmission de la force par l’eau comprimée, les machines à vapeur, celles qui sont mises en mouvement par un cheval, et beaucoup d’autres encore, il resterait à dire quelles sont celles dont il a voulu parler ; je ne le devine pas.

L’étude de quelques-unes des leçons d’Auguste Comte m’a remis en mémoire un mot d’Arago, dont l’exagération, lorsque je l’ai entendu, m’avait choqué. Arago peut-être venait de lire les mêmes leçons, et sa sévérité est excusable. Comte l’avait attaqué violemment, en le mettant personnellement en cause dans une affaire à laquelle il n’était pas mêlé. Arago n’appartenait pas au conseil de l’École polytechnique, où Comte l’accusait d’exercer « sa déplorable influence ». Arago n’était pas endurant ; il s’écria : « Puisqu’il veut la guerre, il l’aura. J’examinerai ses titres scientifiques, comme j’ai examiné ceux de Pontécoulant, et il ne pourra plus être question de le nommer professeur. »

Qu’il soit fait avec passion et sur un ton de mordante ironie, comme Arago le projetait, ou avec indifférence, et dans le seul intérêt de la vérité, comme je viens de le tenter trop rapidement, l’examen des écrits de Comte sur la mécanique justifie ceux qui lui ont préféré Sturm. Comte, si on l’eût nommé, aurait appris