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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 novembre.


La réouverture des Chambres a eu lieu il y a une quinzaine de jours déjà, et le travail parlementaire — nous parlons du travail utile — n’en est pas plus avancé. On a vu s’écouler tout un flot d’interpellations sans que le budget ait été même entamé, et c’est cependant au budget que devrait être consacrée la session extraordinaire d’automne. En fait, jusqu’ici, on s’est contenté de perdre du temps. Les radicaux et les socialistes ont si souvent répété pendant les vacances que le cabinet présidé par M. Méline ne subsisterait pas vingt-quatre heures après la rentrée, qu’ils ont peut-être fini par le croire. Ils ont essayé de le renverser par tous les moyens, le prenant d’un côté, puis le reprenant de l’autre, et conservant toujours l’espoir d’un accident heureux. Cet accident ne s’est pas produit.

Une première interpellation sur les affaires de Carmaux avait paru devoir donner quelques bons résultats, et n’a rien donné du tout. Le gouvernement a eu, d’emblée et comme entrée de jeu, une majorité qui s’est élevée à environ 80 voix. Les radicaux, très étonnés, sont restés convaincus qu’il y avait eu malentendu, erreur, maldonne, mais qu’il serait facile de réparer tout cela. Ils comptaient par-dessus tout sur une interpellation de M. Mirman, député de la Marne, radical-socialiste, naguère professeur de mathématiques, puis député, puis soldat malgré lui, d’ailleurs homme disert et qui semblait très apte à porter au ministère le coup décisif. Pendant les fêtes russes, c’est-à-dire à un moment où l’attention publique s’appliquait tout entière à un seul objet, les catholiques ont tenu à Reims un congrès, ou plutôt trois congrès successifs qui ont eu des caractères très divers, et dans quelques-uns desquels ont été tenus des propos assurément condamnables. Il ne semble pas que M. Mirman et ses amis aient été bien d’accord sur le parti à tirer de ce mince incident. M. Mirman, qui se pique d’être libéral à sa manière, n’a pas désapprouvé la liberté grande laissée aux catholiques ; il a demandé seulement qu’on en accordât une non moins grande aux membres du corps enseignant. Plus grande même ! Parce que certains écarts de langage ont été commis à Reims, M. Mirman aurait voulu, conformément à une logique dont les radicaux gardent le secret, qu’on autorisât les membres de l’Université à s’organiser en syndicat permanent, peut-être même en fédéra-