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cérémonies, le pasteur demeurait libre d’opter ; ils pourchassaient telle formule d’introduction au symbole, par laquelle le pasteur semblait plutôt annoncer la lecture d’un document, la récitation d’un témoignage historique, qu’exprimer sa propre conviction ; ils en venaient à s’alarmer, même, de cette formule d’engagement : « Oui, avec l’aide de Dieu », préférant « un la net, clair et joyeux », comme si l’expérience leur eût fait craindre qu’un appel au secours divin n’annulât le la et n’abritât l’hypocrisie.

Derechef, la commission se réunit ; elle remania son travail, avec d’étranges oscillations. Le bruit courut, en mai 1894, qu’elle continuait d’exclure le symbole des cérémonies de l’ordination. Lorsque fut mis au jour le projet définitif, le symbole y resplendissait, à une autre place, d’ailleurs, — et, paraît-il, moins choquante pour les incroyans, — que dans l’ « Agende » de 1829. Présenté et signé par Guillaume II, roi de Prusse, ce texte fut soumis, en novembre, au synode général extraordinairement convoqué. Dans ce synode, auguste parade d’union, les plus croyans, comme MM. Hollzheuer et Zorn, se félicitèrent de l’obligation qui continuait de peser sur le pasteur : « Est-elle d’un caractère juridique ? demandait M. Zorn : c’est là une question que nous tenons pour superflue » ; mais comme à certaines heures on ne l’avait point tenue pour telle, M. Koestlin, parlant au nom d’un groupe moins strictement confessionnel, put constater avec affectation que l’importance du symbole n’avait point été augmentée. Malgré ces restes d’escarmouches, il y eut au synode une quasi-unanimité officielle ; la presse, naturellement, fut moins unanime en ses commentaires. On salua l’« Agende », dans certains journaux très orthodoxes, comme une barrière contre le libéralisme ; de cette barrière, la presse adverse parut médiocrement inquiète. M. le pasteur Rade, l’un des maîtres du chœur de la théologie « moderne », observa, dans la Chronik der christlichen Welt, que sur la valeur objective du symbole et sur le degré de perfection avec lequel il traduisait les vérités religieuses, l’ « Agende » laissait les opinions libres ; et les jeunes écoles, à l’abri de cette remarque, maintenaient leur liberté d’opinions.

Deux années de discussions avaient ébranlé le crédit du symbole auprès d’une partie de l’Eglise protestante : avec la liturgie nouvelle, non moins qu’avec l’ancienne, les accommodemens demeuraient possibles ; sur la portée juridique des professions de foi imposées aux pasteurs, on n’avait point osé se prononcer ; et la théologie moderne gardait tous les bénéfices du mouvement d’opinion qu’elle avait créé, sans être réellement atteinte par le mouvement de recul auquel les autorités religieuses, en réintégrant