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de M. le pasteur de Soden, de Berlin. Pour la confirmation, qui constate et qui scelle l’initiative du chrétien évangélique, qu’a-t-on besoin du symbole ? Outre que les enfans n’en savent point saisir les formules, une profession de foi librement composée, personnellement énoncée par chacun d’eux, n’aurait-elle pas plus de valeur ? Que pour tous les jeunes chrétiens admis à la confirmation, une adhésion publique à une formule définie soit obligatoire, cela paraît à M. Bornemann, de Magdebourg, une immoralité, une impiété. Et quant à l’ordination, enfin, il est permis de supposer, chez les futurs pasteurs, des doutes à l’endroit du vieux symbole, et une aptitude d’élite à se faire eux-mêmes leur foi : est-il légitime de négliger leurs doutes en les voulant enchaîner au symbole, et ne ferait-on pas mieux d’éprouver leur aptitude en les priant d’énoncer leur croyance individuelle ?

D’une façon logique, cette série de conséquences est déduite par les théologiens libéraux ou « modernes » : pour plaider la cause de la liberté, la Réforme n’est jamais à court d’argumens. C’est une ingrate tâche, pour les orthodoxes, d’établir les droits de l’autorité, de commander le respect du symbole, de réclamer enfin une déférence uniforme aux habitudes liturgiques et aux traditions dogmatiques de la communauté. On leur objecte la « Formule de concorde », document luthérien du XVIe siècle, où les symboles sont présentés simplement comme un « témoignage » et une « énonciation » de la foi, et où l’Écriture est proclamée « juge » de cette foi. Ce texte, gênant pour les prétentions orthodoxes, offre aux incroyans une échappatoire ; puisqu’en dernier ressort l’Écriture est juge, ils finiront par adhérer au symbole, non parce que, mais autant que sa conformité avec l’Écriture sera pour eux évidente. « Restriction mentale ! » s’exclame M. le pasteur Glage. Préférerait-il l’excuse du célèbre pasteur de Sydow, de Berlin, qui déchirait le symbole devant ses collègues de la libérale « Association protestante », et qui le prononçait, pourtant, devant la communauté ? À quelqu’un qui s’en étonnait : « Je ne professe pas ces articles, répondait-il, je les lis. » Une Revue luthérienne accusa Berlin d’avoir, en cette circonstance, « offert au monde le spectacle d’un mensonge jésuitique » ; mais si l’on n’avait point tracassé M. de Sydow, le « mensonge » eût pris moins de relief ; et lorsque les incroyans sont flétris comme des auteurs de scandales, ils peuvent demander, de fort bonne foi, si la faute en est à leurs manèges, toujours discrets, souvent onctueux, ou bien à l’impitoyable étalage qu’en fait l’école adverse. Pour satisfaire, en dépit de leurs négations, les consistoires et l’élite croyante des communautés, ils se fient à certaines