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La plus brillante de ces deux industries, celle de l’or, qui a tant contribué au peuplement rapide de l’Australie, est bien loin aujourd’hui d’être la plus essentielle, quoiqu’il ait été extrait depuis quarante-cinq ans des mines et des placers d’Australasie 9 milliards et demi de francs de métal jaune, dont près des deux tiers proviennent de la seule colonie de Victoria. Après avoir atteint une moyenne annuelle de 280 millions pendant la première décade d’années qui suivit la découverte des mines, la production aurifère était tombée en 1886 à la moitié de ce chiffre, par suite de l’épuisement de nombreux placers à Victoria, en Nouvelle-Zélande, dans la Nouvelle-Galles du Sud. Depuis 1887, l’importance croissante des mines du Queensland, et tout récemment la découverte de celles de l’Australie de l’ouest, jointes à une recrudescence d’activité à Victoria et en Nouvelle-Zélande, ont de nouveau beaucoup augmenté l’importance de l’extraction. En 1895, il a été extrait dans le monde entier plus d’or qu’en aucune année précédente : si la colonie de l’ouest tient ses promesses, peut-être l’Australie arrivera-t-elle aussi à dépasser tous ses chiffres antérieurs. Mais, si grande que soit cette industrie, le nombre d’hommes qu’elle occupe est relativement très faible : il ne s’élevait, en 1892, qu’à 54 000, dont un dixième de Chinois, qui arrivent à gagner leur vie en lavant une seconde fois les sables déjà traités par les blancs. C’est là vraiment un chiffre infime et qui montre bien que les mines d’or sont surtout, pour les pays où elles se trouvent, une excellente réclame, mais ne peuvent d’elles-mêmes nourrir qu’une proportion très restreinte des immigrans qu’elles attirent. D’ailleurs, l’exploitation des mines d’or a très rarement pris en Australie le caractère d’une grande industrie comportant de très vastes installations matérielles qu’elle a aujourd’hui au Transvaal. Des concessions peu étendues, aux mains de petits groupes de quelques personnes, qu’on s’efforçait de travailler très économiquement, beaucoup de placers ou alluvions aurifères exploités quelquefois par des mineurs individuels, voilà quelle a été surtout, jusqu’à ces trois ou quatre dernières années, l’organisation de l’industrie aurifère. L’incertitude sur la durée des mines, plus grande en Australie que partout ailleurs, a contribué à lui donner ce caractère : j’ai entendu dire bien des fois à des « capitaines, » — c’est ainsi qu’il est d’usage d’appeler les directeurs des exploitations minières, — qu’en règle générale les actions d’une société devaient se capitaliser au denier trois. Quelques mines cependant font exception, et certaines d’entre elles, aux environs de Bendigo, ont aujourd’hui poussé leurs puits à plus de 900 mètres de profondeur.