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examiné, jugé, et refusé cette note qu’il n’avait pas lue, il m’aurait su mauvais gré de l’atteinte portée à ses droits.

« La publication des Comptes rendus, ajoute Libri, enlève chaque année à l’Académie des sommes très considérables qu’elle devrait consacrer au progrès de la science. »

Volontaire ou non, l’erreur est complète. Les Comptes rendus ont leur budget qui jamais n’a été et n’a pu être prélevé sur les fonds destinés à d’autres services.

Libri, s’éloignant de la vérité et de la raison, attribue aux prix de plus en plus nombreux que distribue l’Académie une influence regrettable sur les travaux de ses membres.


Il est hors de doute, dit-il, qu’en chargeant ce corps de distribuer chaque année des sommes très considérables pour des travaux de médecine pratique, de mécanique et de chimie appliquées aux arts, on a rendu un très mauvais service à l’Académie en masse, qui s’est trouvée engagée de plus en plus dans la voie de la science subalterne, et à chacun de ses membres en particulier, qu’on oblige à perdre un temps précieux pour examiner une foule d’inventions et d’ouvrages qui ne sont trop souvent que des entreprises purement industrielles.


La liste de nos lauréats répond chaque année à cet étrange regret.

Les critiques de Libri étaient présentées avec convenance. Tout le monde, écrivait-on dans un journal quelques semaines après leur publication, a été frappé de leur modération et de leur impartialité. De leur modération, il est juste d’en convenir, mais de leur impartialité ! qui peut le savoir ?

L’article de Libri attaquait l’influence, et beaucoup aussi, la personne d’Arago. Sur de tels sujets, on peut, sans beaucoup d’habileté, et sans beaucoup de peine, associer la modération à toutes les méchancetés, à toutes les insinuations, à toutes les calomnies et à toutes les injustices.


Eh bien, donc, dit Libri, puisqu’il faut nommer le magicien qui a eu le pouvoir de produire cette grande transformation,… ce magicien, c’est M. Arago.


Pourquoi tant d’importance abandonnée par l’Académie à un seul de ses membres ? L’Académie, c’est là l’explication qu’il propose, frappée par une triste fatalité dans ses membres les plus illustres, l’Académie qui avait vu disparaître en dix ans Cuvier, Laplace, Fourier, Fresnel, Jussieu, Ampère, Legendre et Dulong, privée de la plupart de ses chefs naturels, ne savait plus autour de qui se grouper, et acceptait sans murmure les pilotes qui s’emparaient du gouvernail.

Il était vrai, malheureusement, que l’Académie avait fait, coup