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outils permettant de travailler le marbre. Est-ce à lui que vous auriez fait honneur des chefs-d’œuvre enfantés par le génie des Phidias, des Polyctète, des Praxitèle ? Évidemment non. J’ai eu le bonheur d’être cet ouvrier, mais, s’il avait fallu décerner la médaille, c’est pour ces grands artistes et non pour moi que j’aurais voté. »

Helmholtz avait le sentiment, assez justifié à nos yeux, qu’en faisant de lui simplement l’inventeur de l’ophtalmoscope, on ne lui rendait pas justice. Quoi qu’il en soit, le jeune professeur se trouva naturellement engagé par ce premier et retentissant succès à continuer ses recherches sur la physiologie de l’œil. Il avait, en 1851, trouvé l’ophtalmoscope pour explorer la surface de la rétine ; en 1854, s’inspirant d’un principe appliqué par Bessel à la mesure de la parallaxe des étoiles, il construisit un ophtalmomètre destiné à mesurer la courbure externe de la cornée[1].

Mais, sur ce terrain, Helmholtz ne pouvait ni ne voulait se renfermer dans le rôle d’un pur physicien, d’un pur mathématicien. Il allait aborder des problèmes d’un ordre plus élevé que la simple description ou la simple mesure.

L’étude physiologique, — nous dirions presque aussi psychologique, — de la vision comprend trois parties bien distinctes. La première donne la description des moyens par lesquels le mouvement vibratoire extérieur est conduit et transmis jusqu’à la surface nerveuse pour y produire une impression.

La seconde s’occupe de la transformation de cette impression, toute physique, en sensation lumineuse.

La troisième, enfin, la plus intéressante peut-être au point de vue philosophique, traite des lois psychiques au moyen desquelles ces sensations lumineuses nous donnent la perception des objets extérieurs.

L’Optique physiologique d’Helmholtz, parue de 1856 à 1866 dans l’Encyclopédie physique de Karsten, se divise en trois parties : la dioptrique de l’œil, les sensations visuelles, les perceptions correspondantes.

Nous ne pouvons avoir ici la prétention de donner une analyse même incomplète de ce volume de 1 000 pages, mais nous allons essayer de faire comprendre l’intérêt des problèmes posés, et d’en esquisser à grands traits les solutions.

En premier lieu, — et cette question a été traitée de main de

  1. Cet appareil, d’un maniement lent et laborieux, a reçu, depuis une quinzaine d’années, de nombreux perfectionnemens dus à MM. Javal et Schiötz, du laboratoire physiologique des Hautes Études à Paris. C’est devenu un instrument d’une pratique aisée qui rend maintenant les plus grands services pour la détermination et la thérapeutique de l’astigmatisme.