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LE ROMAN SUÉDOIS

I.
LES ORIGINES

Lorsqu’on pénètre au cœur de la Suède, après avoir franchi ces plaines du Sud qui semblent encore un prolongement de la côte danoise, on se trouve en présence d’une nature tout autre, plus calme, plus discrète, plus intime. C’est une suite de grands lacs et de vastes forêts encadrant de petites vallées verdoyantes. Partout, entre la tache sombre d’un pan de forêt et l’azur d’un coin de lac reflétant le ciel, partout s’ouvrent les mêmes petites vallées, avec parfois de soudaines échappées découvrant à l’horizon une autre forêt et un autre lac bleu. Çà et là, répandus dans la vallée, des points rouges : ce sont les maisons des paysans, semées de loin en loin au bord des lacs ou à la lisière des bois, et entourées de champs cultivés. Rarement vous trouverez sur votre route une agglomération de maisons, villages ou bourgs. Chaque fermier veut être seul au milieu de ses terres, près de la forêt où va paître son bétail. Souvent, en revanche, vous verrez se dresser au centre de la vallée, ou sur une hauteur dominant l’horizon, le clocher blanc d’une église, surmonté d’une croix dorée, et près d’elle, la lourde charpente rouge du beffroi. C’est là que mènent tous les chemins, là est le trait d’union entre toutes ces habitations isolées.

D’autres fois vous apparaîtra, au milieu d’une vallée ou d’une clairière dans le bois, un château seigneurial entouré d’un parc ; un château qui est en même temps une ferme, car la noblesse