les deux circonscriptions de Munich, la proportion des catholiques au nombre total des habitans est, respectivement, de 79 et 88 pour 100, et les suffrages recueillis par le centre ne dépassent pas 21 et 28 pour 100. Si quelqu’un semblait appelé, par son insigne expérience du terrain catholique, à réparer ces disgrâces, c’était assurément le comte Conrad de Preysing, neveu de Ketteler ; devant lui, les obstacles foisonnèrent ; il fit tout ce qu’il put, non tout ce qu’il eût voulu. Le centre est traité d’invention prussienne par certains Bavarois de vieille souche. Il est contrebalancé, dans les campagnes — spécialement on Basse-Bavière, où il a perdu la moitié des circonscriptions — par la Ligue des paysans (Bauernbund), dont vainement il signale les candidats comme prolestans ou « libéraux ». On mesurerait assez exactement la force de l’Église romaine en Bavière, en disant que l’électeur ne tolère point de la sentir attaquée : M. de Vollmar et ses amis socialistes sont, en matière religieuse, des opportunistes respectueux. Non moins exactement, on mesurerait la faiblesse de cette Eglise, en disant que l’électeur accepte malaisément, pour ses votes, la discipline du clergé : les candidats de la cure ne sont point, forcément, les élus des fidèles. La presse catholique, en Bavière, est moins riche et moins influente qu’en d’autres pays allemands.
L’esprit public, depuis quelques années, échappe lentement à l’Église, et les mœurs aussi lui échapperaient-elles ? Certaines statistiques des naissances illégitimes tendraient à le prouver. Dans cette laïcisation de la vie publique, dont le socialisme profite, l’État bavarois a sa part de responsabilité : depuis Mongelas, ministre au début du siècle, jusqu’à M. de Lutz, ministre hier, les hommes politiques de la Bavière ont lentement tari la sève catholique. C’est à l’instigation de ce royaume que fut inséré en 1872, dans la législation de l’empire, le fameux « paragraphe de la chaire », prélude du Kulturkampf. Le premier ministre de Bavière, chancelier actuel de l’empire, fut en 1869 le seul gouvernant en Europe qui rêvât d’une ingérence des pouvoirs laïques dans les délibérations du concile. Les prêtres « vieux catholiques » hostiles à l’infaillibilité papale, furent maintenus par M. de Lutz vingt ans durant, dans les paroisses catholiques dont ils étaient titulaires. La réunion à Munich d’un congrès des catholiques allemands fut, en 1890, quasiment prohibée. L’établissement catholique, en Bavière, est somptueusement installé ; mais dans cette installation il est comme calfeutré. On permet au clergé des œuvres de philanthropie, mais s’il se mêlait trop activement aux conflits sociaux, il risquerait d’être arrêté au nom de l’ordre public.