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LA CARTE RELIGIEUSE
ET
L'ALLEMAGNE CONTEMPORAINE

Quiconque a passé par Cologne a visité cette sacristie de la cathédrale où l’on conserve le trésor. Tombe de pierre, obscure en plein jour, elle laisse admirer, sous la pénombre du gaz, les reflets confondus des émaux, des bronzes et du vieil or ; les châsses resplendissantes confisquent les hommages qu’attendraient les saints ossemens ; l’enveloppe fait tort au contenu. Mais on ne remarque point d’ordinaire, le long de la paroi, un modeste parchemin, relique d’histoire parmi ces reliques de joaillerie. Il commémore les solennités de 1842, la pose de la première pierre pour l’achèvement des tours ; de nombreux princes allemands l’ont signé ; ils y parlent de leur piété, de leur concorde, de leur loyalisme, qui trouveront, dans la montée des flèches vers le ciel, une altière et durable expression. La truelle en main, Frédéric-Guillaume IV avait dit : « C’est l’Allemagne qui édifiera cette façade ; et ces portes, Dieu aidant, nous donneront accès dans une ère de prospérité ; elles annonceront à nos descendans qu’elles furent érigées par le même esprit qui, vingt-neuf ans auparavant, sauvait notre patrie de la honte et du joug étranger. Qu’il raconte, ce temple, aux générations futures l’existence d’une Allemagne grande et puissante par l’unité de ses souverains et de ses peuples libres. » De leurs signatures, les princes allemands ratifièrent ce vœu. Il fut bientôt classique : « Comme s’élève ce faîte, grandiose et lointain, disait en 1848 l’archevêque Geissel, qu’ainsi s’élève la patrie allemande jusqu’aux hautes destinées que la Providence lui a réservées parmi les peuples de la