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LA GRANDE ÉPREUVE
DE LA PAPAUTÉ

La France et le Grand Schisme d’Occident, par Noël Valois, 2 vol. in-8o ; Paris, Picard.

Si la durée de la papauté est à ce point prodigieuse que la constatation en est devenue un lieu commun jusque dans la bouche des ennemis du saint-siège, cette durée toutefois est moins étonnante que la continuité dont la papauté est seule à donner l’exemple. De l’Empire, auquel on l’a si souvent comparée, rien ne subsiste plus que le nom ; il faudrait en effet une singulière puissance d’imagination ou un étrange oubli des réalités de l’histoire pour considérer Guillaume II, ou même François-Joseph, comme l’héritier des Césars, tandis qu’aux yeux de tous, des orthodoxes comme des hérétiques, des chrétiens comme des infidèles, des croyans comme des athées, Léon XIII se rattache directement à saint Pierre par la suite auguste et ininterrompue des souverains pontifes. Seule en ce monde, la papauté voit dans son présent le prolongement de son passé. Les circonstances ont beau changer, son histoire présente toujours un intérêt assez actuel pour être celle que l’on raconte avec le moins d’impartialité. On n’y trouve guère, même dans les siècles les plus reculés, de fait qui ne suggère des rapprochemens avec tel autre qui se produit aujourd’hui ou des enseignemens en vue de celui qui se produira demain. En revanche, telle évolution qui se fait sous nos yeux et dont le sens nous échappe, se justifie par une expérience remontant à quinze siècles. Plusieurs à notre époque s’étonnent et s’attristent en voyant la papauté se séparer de ses amis les plus anciens et les plus fidèles pour tendre la main à des