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d’élection et les deux parties du Sénat, permanente et temporaire, se balancent.

Nous ne parlerons pas des sénateurs de droit : fils du roi et de l’héritier présomptif, grands d’Espagne justifiant d’un certain revenu, ou titulaires des plus hautes charges militaires, religieuses ou judiciaires. Des sénateurs à vie, nous ne parlerons que pour rappeler que, si c’est le roi qui les nomme, il est obligé de les choisir en douze catégories de sujets espagnols que la loi détermine. Le point intéressant pour nous est dans les catégories d’électeurs bien plus que dans les catégories de personnes susceptibles d’être appelées au Sénat par le roi.

Les sénateurs élus le sont : 1° par les archevêques, évêques et chapitres de chacune des provinces qui forment les neuf archevêchés ; 2° par les académies : Académie royale espagnole ; Académies d’histoire ; des beaux-arts ; des sciences exactes, physiques et naturelles ; des sciences morales et politiques ; Académie de médecine de Madrid ; 3° par chacune des dix Universités, avec le concours des recteurs et professeurs, des docteurs qui y sont immatriculés, des directeurs d’institutions d’enseignement secondaire et des chefs d’écoles spéciales du ressort ; 4° par les Sociétés économiques d’Amis du pays, lesquelles élisent à deux degrés un sénateur pour chacune des cinq régions où elles se groupent territorialement : Madrid, Barcelone, Léon, Séville et Valence. Toutes ces corporations religieuses, littéraires et savantes désignent ensemble 30 des sénateurs élus, 1 par corporation, à savoir : les archevêchés, 9 ; les académies, 6 ; les universités, 10, et 5 les Sociétés des Amis du pays. Les 150 membres, qui restent pour compléter le nombre de 180, sont élus par les conseils provinciaux (équivalent de nos conseils généraux), des délégués des conseils municipaux et les principaux contribuables, ce qui, on le voit, ne laisse pas de se rapprocher un peu de notre système français.

Comment ne pas estimer qu’au total c’est une organisation très remarquable, où peut-être ce qu’il y a de plus remarquable, c’est le droit de représentation conféré aux Sociétés économiques des Amis du pays ? Pour les archevêchés et les chapitres, en effet, et pour les universités et même pour les académies, on pourrait présenter ce droit comme une survivance d’un régime ancien aux origines reculées, comme une espèce de fantôme d’histoire qui revient et rôde dans les institutions ; mais, pour les Amis du pays, leur origine ne se perd point en la nuit des temps : on connaît parfaitement l’époque de leur premier épanouissement, qui fut le règne de Charles III ; la date de leur fondation, qui est 1785 ; le nom de leur fondateur, qui fut le comte de Campomanes. Elles