une délégation de la minorité d’intervenir en faveur de la conciliation, ne croyait pas pouvoir se rendre à ce vœu. Cinq jours plus tard, le concile tenait sa quatrième session et ratifiait par 533 placet contre 2 non placet son vote précédent.
Le lendemain, 19 juillet, la guerre était déclarée entre la France et l’Allemagne. Dans le tourbillon de ces événemens tragiques, la question proprement religieuse semblait reléguée à l’arrière-plan. On pouvait croire que la Providence n’avait permis à la papauté d’atteindre le dernier terme d’une lente évolution que pour la précipiter de plus haut dans l’abîme : t lapsit gra-viore ruat. Les troupes italiennes, docilement attachées aux talons des Prussiens victorieux, entraient à Rome le 20 septembre par la brèche peu glorieuse de la Porta Pia. Etait-ce la fin de l’autorité spirituelle en même temps que du pouvoir temporel du Saint-Siège ? Etait-ce le châtiment de la proclamation de l’infaillibilité ? Manning n’en crut rien. Tout en maintenant la protestation du droit violé contre l’usurpation sacrilège du patrimoine de saint Pierre, il vit d’emblée qu’une ère nouvelle s’ouvrait, où la papauté, dépouillée de ses domaines temporels, réduite à sa seule prérogative spirituelle, allait devenir l’arbitre des peuples et des rois, si elle savait user de sa royale misère et de sa puissance idéale. À ses yeux la définition du dogme de l’infaillibilité à la veille de cette brutale invasion était providentielle au plus haut point. Peut-être, dans les dernières années de sa vie, quand ses idées se furent tout à fait mûries et que sa haine des alliances néfastes entre les causes terrestres, les principes contingens, comme celui de la légitimité, et la cause de Dieu et de son Église, se fut fortifiée, n’aurait-il pas fallu beaucoup le presser pour lui faire avouer que la destruction du pouvoir temporel avait aussi quelque chose de providentiel ? Non qu’il rêvât d’impossibles et de déshonorantes transactions entre le Vatican et le Quirinal, ou qu’il fléchit dans l’imprescriptible revendication de la souveraineté nécessaire du chef de l’Église catholique. Certes, ce n’était pas chez l’archevêque de Westminster, — converti, comme il l’était, par la virile pratique du régime de la pauvreté et de l’indépendance d’une Église entièrement séparée de l’État, à la doctrine de la liberté pure et simple, comme en Angleterre et en Amérique, — ce n’est pas chez lui qu’il eût fallu chercher un partisan de ces concordats bâtards qui réduiraient le père commun des fidèles au rôle d’un chapelain de la maison de Savoie. Fils dévoué, ami fidèle de ce Pie IX, qui le récompensa de tant de zèle en l’élevant au cardinalat en 1875 et dont il eut la consolation de recevoir un tendre adieu : Addio, carissimo, à son lit de mort, avant de lui fermer pieusement les yeux, Manning aurait cru trahir son