rénovation, l’établissement anglican, mutilé, dévasté, ruiné à la Réformation, restait incapable d’offrir un asile aux pénitens et un refuge aux disciples du Christ.
Son journal, ses lettres à Robert Wilberforce, à M. Gladstone, sont remplis de ces tristes aveux. Toutefois Manning, comme Newman, dont il n’avait pas le tempérament intellectuel, plus que lui peut-être, aurait prolongé la résistance à ces doutes s’il n’avait eu à livrer bataille que contre eux. Il avait une répugnance une terreur invincible à la pensée de qui Lier son Eglise. « C’est la chose du monde, pour moi », écrivait-il, « qui ressemble le plus à la mort. » Quelle peinture de l’état de son aine dans cette lettre à l’un des confidens de ses angoisses : « Tous les liens de la naissance, du sang, de la mémoire, de l’affection, du bonheur, des intérêts, toutes les séductions qui peuvent agir sur une volonté, m’attachent à ma croyance actuelle. En douter, c’est révoquer en doute tout ce qui m’est cher. Si je devais y renoncer, ce serait pour moi comme la mort. »
Par bonheur il se poursuivait en lui, dans le même temps, un travail intérieur, positif, qui portait des fruits dans sa vie et qui devait lui donner l’impulsion décisive. L’école d’Oxford lui avait donné une conception nouvelle de l’Eglise, peut-être la notion de l’unité : mais c’était la foi au Saint-Esprit, à son office propre, à son action constante — dans l’Eglise, comme source d’infaillibilité, dans les âmes, comme cause de certitude — qui allait achever cette œuvre, réunir les membra disjecta de cette doctrine et en faire une religion vivante. Rien n’est plus frappant que de constater à quel point Manning, pendant qu’il livrait cette lutte intérieure et qu’il se croyait encore anglican, était déjà catholique par l’instinct, par le cœur, par la pratique et les méthodes. Il l’était par sa conception des sacremens, par sa célébration du sacrifice eucharistique, par sa pratique de la confession.
Manning se confessait lui-même, tantôt à son curé, Laprimaudaye, qui le précéda dans le catholicisme, tantôt à d’autres ecclésiastiques. Il recevait les confessions des fidèles et professait que le sacrement de pénitence, bien loin d’être un conseil de perfection, comme l’avait insinué en un jour de relâchement Robert Wilberforce, était un commandement d’autant plus strictement obligatoire que le péché abonde davantage. Une lettre curieuse de lui expose à Mme Sidney Herbert, la femme de l’éminent homme d’État, son ami particulier, ses vues sur le sujet délicat de la limite des droits du prêtre et du mari en matière de confession et de direction de conscience. Manning, comme tous les anglo-catholiques de l’époque, violait un peu les règles de l’Eglise en