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LA
POÉSIE ET LES POÈTES CONTEMPORAINS
EN ALLEMAGNE

Un critique allemand a dit qu’il fallait entendre par le mot « romantisme » la tendance de l’esprit humain à se donnera la métaphysique, à la musique, et à la poésie lyrique. La définition est large, si large qu’elle ne définit et n’enveloppe plus en aucune façon ce que les Allemands ont eux-mêmes qualifié de « romantisme » chez eux, à la fin du siècle dernier et au commencement de celui-ci. Mais, en revanche, peut-être pourrait-on fort bien l’adopter si on la considérait comme s’adaptant à ce qu’il y a de meilleur et de plus parfait dans l’esprit et l’art allemands. Et alors il faudrait dire que l’esprit et l’art allemands, considérés de la façon la plus générale, sont, de par la nature même de la race, voués au « romantisme ».

Que cette source de romantisme n’est point près de se tarir au fond de l’âme allemande, c’est ce que nous ont prouvé, tout récemment encore, d’admirables exemples, du moins pour ce qui est de la musique et de la métaphysique. Les noms de Wagner et de Schopenhauer n’ont rien qui le cède à ceux des Kant et des Hegel, ou des Bach et des Beethoven. Mais il semblait d’autre part, depuis trente ou quarante ans, que, dans l’ordre de la poésie lyrique, une sorte de voile se fût étendu sur le génie allemand, et qu’après Gœthe, Novalis et Heine, fût tarie la source de lyrisme qui s’était répandue, pendant près d’un siècle sur l’Allemagne. Non pas que l’on eût cessé de vouloir se découvrir des qualités poétiques. On le voulait, mais ou ne le pouvait plus. La quantité des productions lyriques restait considérable, devenait même