chef-d’œuvre d’autobiographie spirituelle, d’analyse psychologique, de subtilité intellectuelle et de candeur morale, digne de figurer à côté des Confessions de saint Augustin, combien de publications de toutes sortes, — mémoires, correspondances, vies, essais historiques, simples articles, — ne se sont-elles pas accumulées sur cet inépuisable sujet ! Il manque sans doute encore l’œuvre maîtresse qui rassemblera tous ces fils épars, qui groupera tous ces matériaux et qui élèvera, dans de justes proportions, sur de solides fondemens, l’édifice définitif. L’abrégé intéressant, mais incomplet et hâtif, du doyen Church, de Saint-Paul, ne saurait passer pour avoir comblé cette lacune. Peut-être ne le sera-t-elle jamais. Peut-être, s’il n’est pas trop présomptueux d’avouer ici une telle ambition, sera-ce d’où l’on s’y fût le moins attendu, — du dehors, d’une main étrangère, — que partira l’œuvre souhaitée. En attendant ce tableau d’ensemble, les biographies monumentales de Newman, de Pusey, aujourd’hui de Manning, permettent déjà d’embrasser d’un coup d’œil de vastes pans d’horizon. Les Dii minores, les Keble, les Ward, les Richard Hurrell Froude, les Robert et Henry Wilberforce, les Isaac Williams, les Charles Marriott, ces Douze hommes de bien dont le doyen Burgon nous a laissé une galerie de portraits, ont été mis en pleine lumière. Quant aux mémoires, ils foisonnent : les souvenirs de Palmer, les lettres de J. -B. Mozley, les réminiscences bavardes et cancanières de Thomas Mozley, cet Ana peu édifiant d’un cénacle religieux, cette promenade dans les coulisses d’un parti d’Eglise par un ecclésiastique mondain et passablement sceptique, en dépit ou peut-être à cause de son habit.
Il faut mettre dans une classe à part les confessions des naufragés de l’anglo-catholicisme. Infortunés qui subirent l’influence de Newman tout juste assez pour répudier les confortables compromis, les accommodemens de la religion officielle et courante, pas assez pour s’élancer et s’établir solidement sur le roc du dogmatisme, de la foi d’autorité ; qui ne s’inoculèrent la fièvre mystique que pour se réveiller, frissonnons et accablés, après l’accès, et qu’une passade de catholicisme laissa retomber dans le scepticisme découragé ou l’agnosticisme militant. C’est Francis Newman, le cadet de John Henry, esprit inquiet, vagabond, d’abord missionnaire en Perse, puis déiste en Angleterre, en tout l’antitype de son glorieux aîné, auquel l’unit pourtant une de ces ressemblances paradoxales faites de la similitude des traits particuliers et du contraste de l’ensemble. Il est l’auteur des Phases de la Foi et de ce curieux et triste pamphlet qu’il crut devoir déposer sur la tombe à peine fermée de son frère. C’est encore James-Anthony Froude, l’historien, frère cadet de Richard Hurrell, grandi