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plus en plus en abondance au Japon, et déjà les usines indigènes y font concurrence aux importations étrangères. Les Belges, qui ont mis en mouvement plus d’une usine en Russie et ailleurs, ont installé une fonderie importante à Hang-Kéou sur le fleuve Yang-tse-Kiang, et cette fonderie, qui n’était autre qu’une annexe des établissemens, Cockerill de Seraing, serait passée, dit-on, au compte de la maison Krupp, laquelle ne tarderait pas à être suivie de près par les maisons Schneider, Armstrong, etc. Des missions s’organisent en effet en Europe en vue d’établir principalement en Chine des succursales de nos grandes industries. Pour ce qui nous concerne, la Chambre de commerce de Lyon, et d’autre part les maîtres de forges de France, auraient envoyé des délégués étudier de près la question. On ne l’étudiera jamais trop ; nous ne pouvons laisser nos concurrens agir et nous abstenir ; mais que l’Europe ne se laisse pas trop entraîner, ou plutôt qu’elle s’instruise de l’exemple de l’Angleterre, et, s’il en est temps encore, qu’elle prenne garde de ne pas forger elle-même, en vue d’un bénéfice éphémère, les armes qui doivent la frapper.

Si l’importation des marchandises européennes « qu’on ne consomme pas » se maintient et même augmente au Japon, en revanche on voit baisser sensiblement et disparaître les autres. Les bières allemandes dont les Japonais étaient friands se fabriquent maintenant dans le pays. On a fondé à Osaka une raffinerie de sucre, une autre à Nahégama au capital de 750 000 dollars. Les chapeaux, les casquettes constituaient un article considérable d’importation de l’Angleterre ; les Japonais les imitent et les confectionnent à si bas prix qu’ils les exportent à présent. De même pour les flanelles dont l’Allemagne faisait un commerce rémunérateur.

Rappelons que les Japonais profitent non seulement du bas prix de la main-d’œuvre et des frais généraux de production, non seulement de la dépréciation de l’argent, mais encore des découvertes européennes que les brevets d’invention, les marques de fabrique protègent insuffisamment. Moyennant une très légère modification introduite dans le mécanisme d’un métier européen, qu’ils n’achètent que pour le copier, ils s’approprient, dit-on, la machine tout entière, l’avantage de la fabriquer, de la vendre et de l’exploiter. C’est en partie pour ce motif que les cotonnades japonaises font victorieusement concurrence à celles de l’Inde, tissées avec des machines déjà plus anciennes.

Mêmes avantages pour les filatures japonaises de soie et celles de laine. Le coton nous touche moins en France qu’il n’intéresse l’Angleterre mais il n’en est pas ainsi pour les tissus de laine. Le Japon ne néglige rien non plus dans cette voie ; il a