Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 134.djvu/295

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toutes les autres et de plus en plus voisines du domaine moral et social.

Pour ne parler que de la période contemporaine et des travaux à tendance plus ou moins idéaliste, nous devons, outre les œuvres déjà mentionnées, rappeler encore ici les importantes contributions de M. Pillon à la Critique philosophique et à l’Année philosophique, les études de M. H. Marion sur la solidarité morale et sur l’éducation, celles de M. Liard sur la science positive et la métaphysique, de M. Gabriel Séailles sur le génie dans l’art, sur la philosophie de Vinci et sur Renan. Il est bien d’autres travaux encore d’inspiration idéaliste que nous oublions et qui tous témoignent d’une vitalité et d’une force incontestables dans la philosophie actuelle de notre pays.

En même temps que l’idéalisme, la philosophie positive n’a cessé d’y faire des progrès. Au reste, les deux principales directions de l’intelligence ont toujours été représentées chez nous : la tradition spéculative et idéaliste avec Descartes, Malebranche, Bossuet, Fénelon, Maine de Biran, Lamennais, Victor Cousin, Renan ; le courant empirique et plus ou moins positiviste, avec Gassendi, Condillac, l’Encyclopédie, Cabanis, Broussais, Comte, Littré, Cournot, Claude Bernard, Taine, et beaucoup de philosophes contemporains. Nous assistons de nos jours à la constitution scientifique de la psychologie et de la sociologie. L’application de la méthode positive et l’élimination des controverses métaphysiques a produit dans la psychologie, comme dans les autres sciences, un progrès rapide. Cabanis et Broussais avaient déjà fait appel aux données physiologiques ; Comte et Littré ne voulaient admettre que ces dernières ; Stuart Mill, Bain, Lewes et Taine leur assignèrent leur place légitime. Bientôt on vit croître la psychologie physiologique, avec Millier, Weber, Fechner, Donders, Helmholtz et Wundt. En 1860 paraissent les Elémente der Psychophysik de Fechner, en 1874 la Psychologie de Wundt. En 1876, M. Ribot fonde cette Revue philosophique où les travaux de psychologie expérimentale ont eu une si place si importante. La même année, on voit paraître en Angleterre le Mind, en Allemagne le Vierteljahrschrift fur wissenchaftliche Philosophie, dirigé par Avenarius et ayant Wundt parmi ses collaborateurs. Bientôt on publie le Brain. En 1878, Wundt crée à Leipzig le premier laboratoire de psychologie physiologique. Plus tard un laboratoire est créé à Paris[1]. M. Ribot ne s’est pas contenté d’imprimer une heureuse impulsion aux recherches

  1. Voir le résumé de ses travaux dans l’Année psychologique publiée par MM. Beaunis et Binet ; Paris, Alcan, 1894 et 1896.