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les Heures attelant au char du soleil quatre coursiers fougueux : Pour le Soir, il pourra aller chercher jusque chez les « modernes» ; Tarsis et Zélie dans la vallée de Tempé, pour la Nuit, Phrosine et Mélidor seront des sujets convenables. Quant à l’histoire romaine, elle peut être mise en tableaux, aussi bien qu’en sonnets ; elle offre au paysagiste des ressources infinies. Victor Bertin, élève et continuateur de Valenciennes, ne trouvera-t-il pas un sujet de paysage dans l’épisode de : Tanaquil prédisant à Lucumon sa future élévation au moment où un aigle lui enlève sa coiffure ?

C’est à l’école de Valenciennes, il ne faut pas l’oublier, que se formèrent tous les paysagistes qui, pendant la première moitié du siècle, devaient diriger les ateliers, régenter l’école, composer les jurys, proscrire des salons les hérétiques dangereux, fonder et distribuer le prix de paysage historique, créé en 1816 comme une consécration solennelle de la bonne doctrine et un moyen de résistance aux velléités de naturalisme çà et là persistantes. C’est aux plus fidèles élèves de Valenciennes que Camille Corot allait innocemment demander des leçons.


III

Son premier maître avait été un jeune homme de son âge, que des succès précoces avaient mis en évidence dès 1812, et que, en 1817, le prix de paysage historique obtenu au premier concours avait presque illustré : Achille Etna Michallon. A voir la Mort de Roland du musée du Louvre, on aurait peine à comprendre les espérances que ses maîtres et ses contemporains avaient fondées sur lui. Mais on connaît d’autres tableaux plus intimes et plus clairs, surtout des études franches et lumineuses qui font pressentir un paysagiste de race. M. Émile Michel veut bien m’en signaler une chez M. Eugène Thirion, peinte à Tivoli, à l’endroit même où Corot devait venir un peu plus tard planter son chevalet. « Le dessin en est très fin et scrupuleux, l’exécution très habile, la tonalité charmante ; un effet de plein soleil par un temps très doux avec des nuages légers, flottant dans un ciel pâle. Les valeurs sont très exactement rendues : les colorations de détail respectées, mais bien dans la masse. L’étude poussée à fond dans les parties faites n’est même pas couverte au bas de la toile... » On voyait à Lyon, dans l’atelier d’un vieux professeur de dessin, plusieurs autres études de Michallon, frappantes par les mêmes qualités. Il serait intéressant de les retrouver ; on y lirait clairement quelle influence le jeune professeur put exercer sur son