mains des Villeroy et des Sillery, paraissait excitée par le contact de ses nouveaux conseillers : c’étaient plutôt les parties irritables de son caractère qui se manifestaient maintenant. Elle s’arrachait à son ancienne indolence pour se répandre en crises de dépit et de larmes, où elle accusait tout le monde des fautes qu’elle avait commises, et de celles qu’elle se sentait prête à commettre. Agée de quarante-deux ans, elle entrait dans cette période de la vie des femmes où les regrets sont encore plus insupportables que les remords : le spectacle de leur beauté qui s’effeuille fait, de la maturité des veuves, le plus lugubre des automnes. Un portrait de Montcornet dessine brutalement les carnations pâlies et empâtées du visage, le nez proéminent, les yeux amortis, et les plans graisseux des joues et du menton. Le corps seul pouvait tenir encore ce que la figure ne promettait déjà plus.
On avait perdu pour la reine tout respect. Les pamphlétaires ne se gênaient pas pour incriminer son origine étrangère, ses faiblesses pour les deux Concini et le je ne sais quoi de suspect qui s’affirmait dans les relations avec le mari. Les diplomates ne s’adressaient à elle que par égard pour les prérogatives déjà effacées d’une régence arrivée à son terme. Même ceux qui comptaient sur elle pour la défense de leurs idées ou de leurs intérêts la jugeaient sévèrement : « La reine est, par nature, pauvre de paroles, et encore plus pauvre d’idées, écrivait le nonce Bentivoglio ; dans les affaires importantes, on ne peut rien tirer d’elle, quand elle n’a pas eu le temps de conférer avec ses ministres. »
Concini était le véritable souverain, et les ministres désignés par lui étaient à ses ordres. Il les considérait tous, Barbin, Luçon, Mangot, Brienne, comme des valets et les traitait comme tels. Quand il était à la cour, les conseils se tenaient chez lui. Quand il était absent, on lui écrivait tous les jours pour le tenir au courant des décisions prises. La politique générale du ministère se subordonnait à ses vues particulières.
Il se montrait, d’ailleurs, de plus en plus décidé à affirmer et à exercer l’autorité gouvernementale. C’est la tendance ordinaire des favoris : maîtres de la volonté du souverain, ils veulent qu’elle soit obéie. En poursuivant les « grands », toujours en état de rébellion, il se posait en défenseur de la tranquillité publique et de l’ordre. Il y avait là, pour son gouvernement, une chance sérieuse de succès. Les intérêts sont pusillanimes ; ils se rallient vite à ceux qui parlent haut et qui frappent fort, puisqu’en somme l’énergie dans le gouvernement tourne toujours au profit de ceux qui ont quelque chose à défendre.
Pour l’action, le ministère était bien composé : des hommes