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entre les mains de la seule compagnie De Beers et les lois dont elle a obtenu le vote, s’en sont venus à Johannesburg ; plusieurs de ces équivoques personnages y ont amassé de grandes fortunes. Beaucoup de personnes plus honorables, de toutes professions, ont du reste aussi quitté Kimberley pour Johannesburg ; car la Golconde de l’Afrique du Sud a perdu beaucoup de population depuis quelques années, à la suite de la l’imitation de la production des diamans qui a été la conséquence de la concentration des mines en un petit nombre de mains. Le nombre des Australiens a aussi énormément augmenté dans ces derniers temps, à la suite de la crise intense qui sévit, à Melbourne surtout, depuis 1893 ; ils partagent avec les immigrans venus des mines d’étain de la Cornouailles les fonctions de chefs d’équipe, chargés de diriger le travail des noirs dans les mines.

Parmi les étrangers, les immigrans venus de l’État libre d’Orange, au nombre de 11 527 en 1890, et qui n’ont pas sans doute beaucoup augmenté depuis, forment une catégorie spéciale, généralement de même origine que les Boers du Transvaal, et agriculteurs ; ils sympathisant plutôt avec eux qu’avec les autres Uitlanders. Il en est de même des Hollandais, dont beaucoup remplissent des fonctions publiques pour lesquelles il serait souvent difficile de trouver des Boers en nombre suffisant ; ils étaient 1 420 en 1890 et il doit y en avoir 2 000 à 3 000 aujourd’hui.

Les autres nationalités les plus largement représentées sont les Américains, les Allemands et les israélites russes. Les premiers ont presque monopolise les emplois techniques 2 presque tous les managers, les directeurs de mines et les ingénieurs viennent des États-Unis. Un grand nombre de simples mineurs ont quitté aussi, depuis trois ans, le Nevada et le Colorado où nombre de mines d’argent ont dû cesser leur extraction à la suite de la grande baisse du métal blanc, et sont venus chercher fortune au Transvaal ; il est impossible d’évaluer avec quelque exactitude le nombre des Américains ; il doit être compris entre 6 000 et 12 000. Les Allemands prétendent être 20 000, ce qui semble exagéré ; ils sont très rarement occupés dans les mines, et font principalement le commerce : beaucoup d’entre eux tiennent des stores, des magasins qu’on voit, de loin en loin, isolés en pleine campagne, près du croisement des chemins mal définis du Transvaal, et où l’on trouve tout ce qu’il est possible de vendre. Ils sont ainsi plus directement en contact avec les Boers que la plupart des autres étrangers. Les juifs russes affluent aussi vers Johannesburg. Le jour même où je débarquai à Capetown un paquebot venant d’Angleterre en avait amené 250. Ils arrivent le plus souvent très pauvres, sans presque savoir un mot d’anglais ;