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le pays des Chiquitos, d’Orbigny rencontre le cardinal et le cacique qui possèdent des qualités rarement réunies, la mélodie et l’éclat du plumage. Des toucans font résonner les bois de leurs accens aigus qui se mêlent aux cris désagréables des perroquets d’une multitude d’espèces et des aras rouges et jaunes... Les bois retentissent des cris cadences des pénélopes, des hoccos ; par ses cris à heure fixe le kamichi cornu sert d’horloge aux Indiens.

L’abondance des mammifères est encore plus extraordinaire que celle des oiseaux. Livingstone mentionne une bande de plus de 40 000 euchores ; Delegorgue décrit ainsi une rencontre qu’il fit de ces antilopes : La poussière volait et dans cent directions formait d’épais nuages ; parfois elle s’enlevait en colonnes tournoyantes à 100 et 200 pieds de hauteur... Je ne tardai pas à reconnaître des troupes innombrables de spring-booken qui soulevaient ces tourbillons... Cette vue m’étonna suffisamment pour me questionner moi-même et m’assurer que ce n’était pas une vision ; c’étaient des bandes de 3 000 à 10 000 individus chacune, se croisant à la course sur tous les points à la fois.

Le même voyageur parle aussi de grands troupeaux de gnous, de cannas ; il cite des bandes de 1 000 à 1 500 buffles.

Allen, dans son admirable ouvrage sur les bisons d’Amérique, donne de curieux détails sur l’importance qu’ont eue leurs troupeaux et sur leur extinction. Assurément cette extinction n’est pas aussi triste que celle des pauvres Indiens, qui est une des hontes de l’humanité ; néanmoins c’est grand’pitié de voiries hommes employer leur génie pour détruire tant de précieuses créatures. Entre 1870 et 1875, 2 millions et demi de bisous ont été tués annuellement ; cela ferait pour un siècle 50 millions.

Les solipèdes abondent à notre époque. Delegorgue a vu en Afrique des bandes de 100 à 500 couaggas. M. Blanford dit que le docteur Aitchison a rencontré dans l’Afghanistan un troupeau de 1 000 hémiones. Brehm prétend que, selon Youatt, le nombre des chevaux pour toute la Russie est approximativement de 20 millions de têtes. On sait avec quelle rapidité les chevaux laissés libres se sont multipliés en Amérique.

Les éléphans sauvages finiront par être anéantis par l’homme ; cependant ils sont encore nombreux dans quelques régions. Speeke raconte qu’étant sur les bords du Nil, il se vit au milieu d’un troupeau de plusieurs centaines d’éléphans. Delegorgue a estimé à 600 le nombre d’éléphant rassemblés sur un espace de 3 000 mètres de diamètre, dans le pays des Amazoulous.

Les rongeurs ont une force de propagation surprenante. Voilà longtemps que cette force de propagation est mise à profit